La parole est aux auteurs

Le théâtre tourne toujours autour des mêmes auteurs – souvent morts depuis des années d'ailleurs. Le collectif grenoblois Troisième bureau n'est pas d'accord avec ça, et essaie de changer la donne, en mettant en avant de nouvelles écritures théâtrales. Zoom sur la treizième édition de Regards croisés, et les textes qui seront lus au public. Aurélien Martinez


« On peut s'étonner de la récurrente difficulté que rencontrent, aujourd'hui encore, les auteurs "vivants" à voir leurs textes passer au plateau. Une sorte "d'inertie"  – déplorée unanimement, ce qui devrait surprendre – tend à annihiler toutes velléités de monter les pièces d'auteurs forcément inconnus puisque ignorés. » Cette phrase, piochée dans l'édito annonçant la nouvelle édition de Regards croisés, résume parfaitement la mission du collectif Troisième bureau – à savoir mettre en avant les nouvelles écritures théâtrales. D'où un festival entièrement centré sur le verbe, avec de nombreuses lectures d'œuvres venant de France, d'Europe et d'ailleurs. Une sélection cette année on ne peut plus erratique, entre auteurs qui tombent dans tous les clichés du théâtre contemporain, et d'autres beaucoup plus inspirés. Bien sûr, c'est sur ces derniers que l'on a choisi de s'attarder !

Vive le jeudi

Passons rapidement sur Gilles Granouillet, auteur à succès qui a souvent collaboré avec le metteur en scène François Rancillac (le dernier exemple en date : l'excellent Ma mère qui chantait sur un phare, vu à l'Hexagone de Meylan en mars). Son texte Hermann, narratif et captivant, sera ainsi lu le premier soir du festival (le lundi). Le mercredi après-midi sera consacré au théâtre jeunesse, avec le très juste Mon frère, ma princesse de Catherine Zambon, sur les questions de genre. Quant au samedi, il sera dédié à l'auteur espagnol Pau Miró, avec trois de ses pièces centrées sur le destin d'une famille soudée à la manière d'une meute animale.

Mais si nous ne devions sélectionner qu'une seule soirée, avec toute la subjectivité que l'on nous connaît, ce serait celle du jeudi, où sera présenté le Tout doit disparaître d'Éric Pessan (photo). Sur un sujet on ne peut plus rebattu (les dérives de la société de consommation), l'écrivain français livre une pièce ciselée et énergique dépeignant les heures suivant un terrible drame (un mouvement de foule meurtrier dans un centre commercial lors de l'ouverture des soldes). Chaque témoin prend la parole, les récits se superposent, se complètent, se renforcent, créant une ambiance théâtralement glaçante. Un véritable coup de cœur, que l'on aimerait voir mis en scène.

Regards croisés, du lundi 13 au samedi 18 mai, principalement au Théâtre 145.


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