Paris, Texas

Après avoir accidentellement mangé un trottoir parisien lors du tournage d'un clip, Sharleen Spiteri a toujours les crocs. En témoigne ce retour de Texas dont on ne sait trop s'il nous laisse sur notre faim ou provoque l'indigestion. Stéphane Duchêne


Où en est une carrière quand, trop digne pour se livrer à l'exercice infâmant de la sextape, on en est réduit à candidater pour Vidéo Gag ? Oui, bon Vidéo Gag n'existe plus mais le net n'est-il pas devenu lui-même un lupanar vidéogaguesque ?

Ah c'est sûr, quand on l'a connue avec son carré 90's et ses vestes en jean trop grandes, nous feulant des refrains bluesy à l'oreille, à voir Sharleen Spiteri déguster goulûment un trottoir parisien un peu trop glissant lors du tournage d'un clip, on se dit : 1) que toutes ces conneries ne sont plus de son âge ; 2) qu'il va bien falloir un jour résoudre le fléau des fèces canines sur les trottoirs de la ville lumière avant qu'il y ait un mort ; 3) qu'une bonne promo ne coûte finalement pas grand-chose dès lors qu'on a appris à tomber de haut. Une bonne vieille glissade et hop, pas besoin d'aller lutter contre la sieste sur le canapé rouge de Michel Drucker ou de se froisser un zygomatique à esquisser un sourire gêné devant quelques galéjades du grandjournalesque. 

Conversation

Oui, bon, on est mauvaise langue. D'autant que depuis ses débuts, la Sharleen et ses Texans d'Écosse n'ont jamais vraiment eu besoin de promotion excessive. Si d'un point de vue artistique, Texas a rapidement délaissé les bilans qualitatifs de fin d'année, question bilan comptable, les chiffres sont toujours restés au vert.

Sharleen, c'est le genre de fille, quand elle vous attrape, c'est à vie ; et comme elle vieillit mieux que vous, elle vous préserve un peu. D'autant que la musique de Texas, elle non plus n'a pas bougé. C'est même probablement le plus criant reproche que l'on puisse lui faire – et probablement cette fossilisation qui a permis au groupe de survivre à tout.

D'où peut-être ce retour en forme de retour en arrière avec The Conversation. Chemise western, guitare et mèche en bandoulière – manque plus que la côte de bœuf, et on est au… Texas –, Sharleen veut nous parler alors on fonce. On n'est même pas loin d'être séduits en saluant sur les traces de grandes blues-folkeuses qu'on aime d'amour et n'ont pas eu le bonheur d'une conservation aussi réussie.

En dehors de l'atroce sortie de route dance 80's Detroit City, on est près de succomber quand, sur quelques titres, on croit presque entendre une réincarnation féminine de Roy Orbison. Du moins son intention - Dry Your Eyes, I Will Always, Maybe I. Le problème est que tout cela est produit, réglé, programmé pour les camions à fort tonnage et les autoroutes trop droites. Et qu'on préfère le blues de piétons. Quitte à ce qu'il soit casse-gueule.

Texas, lundi 14 octobre à 20h, au Summum


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