Le Sens de l'humour

De et avec Maryline Canto (Fr, 1h28) avec Antoine Chappey, Simon Dajczman…


On se retrouve devant Le Sens de l'humour comme un voyeur qui épierait par le trou de la serrure la vie intime de son actrice-metteuse en scène Maryline Canto. Ce qui faisait le charme de son court-métrage Fais de beaux rêves, déjà fortement autobiographique mais qui préférait l'évocation au réalisme pur, s'envole ici : Canto y est à nouveau une femme brisée par la mort de son compagnon, qui se demande si elle doit en faire le deuil et démarrer une nouvelle histoire ou tenter de conserver son souvenir et le partager secrètement avec son fils. Sauf que la mise en scène penche du côté d'un naturalisme à base de scènes quotidiennes et de spontanéité des acteurs qui donnent le sentiment de ne jamais vraiment interpréter leur personnage. Quant aux quelques tentatives dramaturgiques, elles n'aboutissent nulle part – comme l'envie de judéité du fils, totalement oubliée dans le dernier acte.

Le film se préoccupe surtout de faire oublier qu'il est une fiction – les nombreux reflets de l'équipe technique dans les vitres y participent, sans doute involontairement – alors qu'au contraire, une distanciation minimale aurait sans doute effacé la gêne que l'on éprouve face à ces atermoiements. Que l'on s'y reconnaisse ou que l'on y soit absolument indifférent, le résultat est finalement le même : comme Guillaume Canet dans Les Petits mouchoirs, Maryline Canto cherche à effacer sans arrêt les puissances factices propres au cinéma pour créer une connexion directe et "vraie" entre l'auteur et le spectateur, qui ne passerait ni par le personnage, ni par l'écriture, ni par l'image, mais simplement par un vécu commun. Ce qui est la définition même du téléfilm, et Le Sens de l'humour en est un, sans discussion possible.

Christophe Chabert


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