"L'Étrange couleur des larmes de ton corps" : bof

d'Hélène Cattet et Bruno Forzani (Fr, 1h42) avec Klaus Tange, Sylvia Camarda…


Après Amer, le couple Cattet / Forzani continue son exploration fétichiste des codes du giallo (un genre de film d'exploitation, principalement italien, à la frontière du cinéma policier, du cinéma d'horreur et de l'érotisme), poussant un cran plus loin encore leurs expérimentations plastiques. Démarche singulière qui consiste à déconstruire chaque morceau de leur récit pour le transformer en court-métrage quasi-autonome s'appuyant sur un procédé formel qu'ils épuisent jusqu'au vertige… Split screens kaléidoscopiques ou photogrammes animés en noir et blanc, les cinéastes cherchent à fragmenter l'action pour la reconstituer de manière impressionniste et sensuelle, aidés par un traitement hyper-réaliste de la bande-son fondée elle aussi sur la répétition de motifs.

Alors qu'il vise une forme d'hypnose ou de sidération, L'Étrange couleur des larmes de ton corps ne fascine jamais vraiment. Car le film se veut aussi narratif et c'est peu dire que sur ce point, il n'est carrément pas à la hauteur de sa mise en scène. Les acteurs sont effroyablement mauvais, les dialogues risibles et le labyrinthe de l'intrigue incompréhensible, ce qui rend les incessantes relances scénaristiques démoralisantes. Le décalage est donc immense entre les ambitions de ce grand huit figuratif et la maigreur de son propos, dont l'immaturité explose lors de la résolution. Dans leur volonté de réunir cinéma de genre et installation d'art contemporain, Cattet et Forzani ne ramènent que les clichés de l'un et la prétention de l'autre.


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