Danse bâtarde


Les fous, les marginaux, les déshérités, les inclassables, tous ceux qui échappent aux normes... Tels sont les personnages qui passionnent le chorégraphe belge Alain Platel et qu'il met la plupart du temps en scène. Pour le pire avec Pitié ! en 2008 ou pour le meilleur avec vsprs en 2006 et ses mouvements inspirés des spasmes hystériques. Lui-même ancien orthopédagogue auprès d'enfants handicapés, Platel fonde en 1984, sans formation de danseur ni de metteur en scène, les improbables Ballets contemporains de la Belgique, devenus les célèbres Ballets C. de la B. Certains ont qualifié son univers puisant dans le réel de « danse documentaire » ; le chorégraphe préfère, lui, le qualificatif de « danse bâtarde », tant il aime mélanger et intervertir les rôles et les disciplines : la danse peut être confiée à des circassiens ou à des comédiens, les danseurs peuvent chanter ou dire des textes, des chanteurs et des musiciens s'immiscent aussi souvent parmi les mouvements des autres.

Sa dernière création tauberbach (que nous n'avons pas encore vue, mais dont on attend beaucoup) est l'adaptation de la biographie d'une schizophrène brésilienne qui vit au beau milieu d'une décharge et qui a développé son propre langage. Une comédienne et six danseurs, sur la musique de Bach et parmi un amoncellement de vêtements, s'inventent, avec violence ou humour, de nouvelles identités, de nouvelles relations, de nouveaux désirs. Avec comme terreau fertile le bordel des corps en mouvement et le chaos des pulsions.

Jean-Emmanuel Denave

Tauberbach, mardi 1er et mercredi 2 avril à la MC2


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