Bienvenue chez lui


Stromae a donc inspiré pas mal de monde, dont Les Guignols de l'info. Au-delà de l'anecdote, sa marionnette a ceci de troublant qu'elle est si vraisemblable qu'on pourrait la confondre avec l'original : même teint cireux, même gestuelle à la fois raide et désarticulée – comme si le sprinteur Michael Johnson avait pris des cours de danse hip hop –, même timbre de marin pas bien droit dans ses bottes en caoutchouc. Ce physique si particulier et la façon dont Stromae en joue, tour à tour imitateur de Jacques Brel pour MJC, figurant d'un clip cadavérique de Michael Jackson et bonimenteur en costume d'Arlequin, constitue la première attraction de ses prestations scéniques.

Le terme "attraction" n'est pas choisi par hasard : une soirée avec Stromae, c'est une virée dans une fête foraine sur les traces d'un pote extraverti et un peu éméché. Il y a d'énormes néons colorés, un palais des glaces (sur Humain à l'eau, Stromae calque ses pas sur ceux, imaginés par la chorégraphe Marion Motin, d'une armée de clones tribaux projetée en fond de scène), un train fantôme (saisissante vision que cette silhouette hurlante qui, à la fin de C'est quand ?, émerge d'une scène plongée dans l'obscurité par de tentaculaires métastases), un grand-huit (émotionnel) qui ne s'arrête qu'une fois les ressources énergétiques à disposition épuisées, des représentations non-approuvées par les ayants droit de personnages populaires (le concert s'ouvre sur un dessin animé à la Kirikou) et, tout le long, des tubes simplistes et néanmoins addictifs balancés à plein volume par des enceintes bon marché. Il faut avouer, c'est assez réjouissant et captivant pour qu'on en sorte avec l'idée que ce show millimétré et tapageur aurait tout à fait sa place dans un festival électro de pointe type Nuits Sonores (Lyon). Du moins celui auquel nous avons assisté en novembre dernier au Transbordeur, à Villeurbanne. Car il paraît que depuis, le tout a évolué pour se conformer aux salles de grande capacité. Mais « t'inquiète pas, tu vas danser ».

Benjamin Mialot

Stromae, jeudi 17 avril à 20h, au Summum
+ le dimanche 13 juillet à Aix-les-Bains, dans le cadre de Musilac


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Taureau ailé