Avant l'oubli


Quel est le prix d'une vie se demande l'auteur Laurent Mauvignier dans son court roman Ce que j'appelle oubli ? Un caddie rempli de bières ? Un pack de 12 ? De 6 ? Dans le cas précis qu'il a choisi, d'une seule canette, qu'un homme a ouvert dans un supermarché pour se désaltérer, ce qui n'a pas été du goût des quatre vigiles qui l'ont tabassé à mort.

De ce fait divers survenu à un SDF à Lyon en 2009, Mauvignier livre un texte fort où le déroulement des événements seconde par seconde mène à la fin tragique. Un long souffle (il s'agit d'une seule phrase de soixante pages) adressé au frère de la victime que le comédien et metteur en scène André Le Hir fait sien, seul sur le plateau nu. Il choisit une interprétation au plus près des émotions, emplissant le récit d'hésitations et d'intonations affectées (il finira à genoux), qui peut parfois donner l'impression d'un manque de confiance dans le texte. Mais sa présence et sa voix magnétiques finissent par captiver sur la durée, donnant à un drame trop vite oublié une puissance romanesque indélébile.

Aurélien Martinez

Ce que j'appelle oubli, jusqu'au samedi 4 octobre au Tricycle / Théâtre de poche

 


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Le goût des autres