L'homme singe le mouton

L'homme est non seulement un animal, influencé par l'effet de groupe, mais c'est en plus une espèce qui maltraite son environnement : un constat bien noir, dépeint avec fantaisie par les sculptures cartonnées de la Canadienne Laurence Vallières à Spacejunk, accompagnées des œuvres des Lyonnais Bullitt Ballabeni et Sophie Haza. Un ensemble hétéroclite mais cohérent, qui interroge. Charline Corubolo


L'homme a des ancêtres communs avec le singe. Nous avons donc avec ce primate des similitudes troublantes mais évidentes qui rendent l'exercice artistique dénonciateur de Laurence Vallières quelque peu facile. Sauf que cette critique est elle-même facile puisque les sculptures en carton de la Canadienne qui envahissent actuellement l'espace de Spacejunk portent en elles plusieurs discours.

Produites lors d'une résidence à Spacejunk Bayonne, les œuvres se font le miroir d'un zoo humain dans lequel on ne sait plus qui est l'animal. Véritable jeu de mimétisme, les attitudes de ces figures troublent, renvoyant à une image allégorique de l'homme dicté par le consumérisme et la technologie. Voûtés, adoptant des postures humaines, les singes de carton dénoncent ainsi ces comportements sociaux et politiques dangereux qui orientent la population vers une ère de l'absurde, à l'image du trophée singe baptisé L'inévitable couronnement des cons. Propos engagé politiquement, mais aussi économiquement.

Dictature de la consommation

En témoigne l'impressionnant singe en train d'engloutir un McDonald's, aussi dégoulinant que le burger qu'il porte à sa bouche. Écho violent de notre société, l'artiste enfonce le clou en titrant Merci de consommer. Car chaque pièce est pensée dans le moindre détail, du titre au sujet en passant par le matériau, pour révéler tous les défauts de notre XXIe siècle. Le carton n'est d'ailleurs pas utilisé par hasard, il devient un lien entre le domaine industriel qui utilise en masse cette matière et le monde de l'art.

Une critique acerbe que l'on retrouve dans les sculptures de métal et de plâtre du couple Bullitt Ballabeni et Sophie Haza. L'ensemble de volumes présenté provient de plusieurs résidences, dont une effectuée en Israël. Malgré une esthétique et une imagerie totalement différentes, les œuvres de la Canadienne communiquent parfaitement avec celles des deux artistes, dont l'axe principal de travail porte sur le territoire, sur les zones que l'homme rase par profit gommant sans conscience le passé.

Monkey snack, jusqu'au samedi 15 novembre, à Spacejunk


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