Vingt mille lieux sur la mer

Avec malice et subtilité, l'artiste Maxime Lamarche met en place dans son œuvre plusieurs niveaux de lecture interrogeant aussi bien les mythes populaires et le statut de l'art que l'illusion des images. Un questionnement dévoilé par des installations, des sculptures et des photographies à découvrir actuellement à l'Espace Vallès. Charline Corubolo


C'est dans le cadre du projet "galerie nomade", exposition ex situ de l'Institut d'art contemporain de Villeurbanne, que Maxime Lamarche, jeune diplômé des Beaux Arts de Lyon, expose à l'Espace Vallès. Dans ce lieu propice aux détournements, l'artiste dessine au gré de sculptures et de photographies un monde marin dans lequel, de manière métaphorique, les sirènes chanteraient faux. Ce retournement du mythe populaire lui permet d'interroger nos certitudes et les aboutissements de l'art.

Alors qu'un bateau semble avoir échoué au milieu de la pièce, l'absurde devient condition de l'ensemble. Devenue non fonctionnelle, l'épave est remplie d'eau avec en son centre un trou, tel un gouffre infini dans lequel le liquide noir ne cesse de tomber. Objet iconique des années 1970, référence à une époque glorieuse et archétype hollywoodien, le navire est utilisé par Maxime Lamarche pour effectuer une remise en place des éléments, sorte de mise en abyme de notre XXIe siècle désabusé. En face de cette œuvre, un néon signe la tempête, le naufrage étant la résultante, tandis que la barrière qui les sépare oscille entre élément sculptural pratique et œuvre d'art.

Derrière les images

Une réflexion qui se prolonge à l'étage avec une série d'images dont les signes mènent à une confusion des genres. Encadrés telles des photographies, les visuels ont préalablement été pliés comme des posters. La poésie dévastatrice du bas laisse donc place à un jeu sur le statut des œuvres mais aussi sur le rang des images. Notre œil semble percevoir une voiture recouverte d'un drap, une autre à moitié immergée dans un lac. Mais rien de tout cela n'est réel, l'artiste ayant créé de toute pièce ces mises en scènes dans lesquelles il n'y a pas de voiture sous le drap devenu sculpture, dans l'autre cliché seul l'arrière de l'automobile est présente, posée sur un radeau.

« Il n'est visible que ce qui existe » explique Maxime Lamarche. Entre supercherie et décontextualisation des objets, il plonge les images et les croyances, populaires ou artistiques, dans une sorte de paradoxe délectable.

Les sirènes chantent toujours faux, jusqu'au samedi 20 décembre, à l'Espace Vallès (Saint-Martin-d'Hères)


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