L'évasion rap de Shabazz Palaces


Comme beaucoup d'autres domaines, le rap est aussi vaste et diversifié que vous êtes prêt à l'envisager, ou aussi étroit et étriqué que ce à quoi vous souhaitez le restreindre. Beaucoup le réduisent ainsi à son seul ancrage dans la réalité : débauche matérialiste d'un côté (le fameux triptyque sexe, argent, drogue) et chronique sociale âpre et engagée d'un quotidien peu reluisant de l'autre. C'est oublier un peu vite qu'il peut être tout cela à la fois… et en plus surréaliste, psychédélique, expérimental et futuriste.

Un groupe comme Shabazz Palaces nous le rappelle. Réunion a priori incongrue d'un vétéran de la scène jazz-rap du début des années 90 (Ishmael Butler, ancien MC du groupe Digable Planets) et d'un producteur multi-instrumentiste surdoué (Tendai "Baba" Maraire), le duo de Seattle, révélé en 2009 par la sortie de deux EPs inauguraux, puis passé à la postérité via deux albums adulés par la critique (Black Up en 2011 et Lese Majesty en 2014) n'est pas du genre à se laisser enfermer dans un créneau précis.

Associant les délires science-fictionnels des pionniers du rap old-school et les expérimentations électronisantes du rap indépendant du début des années 2000 avec une absence de complexes typique du rap actuel, Shabazz Palaces s'aventure dans les directions musicales les plus improbables, se plante parfois dans le décor, mais trace finalement une voie musicale planante, riche et inventive que personne d'autre ne se risque à explorer.

Shabazz Palaces (+ Skip&Die), samedi 11 avril à 20h30, à la Belle Electrique


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