Blind

D'Eskil Vogt (Norvège, 1h31) avec Ellen Dorrit Petersen, Henrik Rafaelsen…


Connu pour avoir coécrit les scénarios de Joachim Trier (bientôt en compétition cannoise avec Louder than bombs), Eskil Vogt se lance ici dans la mise en scène, mais il est vite rattrapé par sa nature d'auteur. En effet, à travers son personnage principal, une femme devenue aveugle qui se met à rêver le monde et les gens qui l'entourent comme une romancière fabriquant des morceaux de fiction, il offre un reflet à peine fantasmé de sa propre situation.

Blind se grise de sa structure labyrinthique et de son étrangeté, grillant ses meilleures cartouches au cours de sa première demi-heure : ainsi, tandis qu'Ingrid perd la vue, son mari développe des pulsions voyeuristes, traînant sur YouPorn ou espionnant sa voisine d'en face. Pour faire sentir l'aveuglement, la mise en scène amplifie les autres sens de son héroïne, mais là, Vogt ne fait que reprendre la plupart des idées développées par Meirelles dans son sous-estimé Blindness.

Au bout d'un moment, le procédé lasse, le film patinant dans ses mises en abyme glaciales et son petit traité cérébral sur le réalité et le fantasme. À la différence de Trier, Vogt a bien du mal à faire entrer l'émotion et à donner de l'épaisseur à des personnages qui, ici, ne sont que des figures théoriques.

Christophe Chabert


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