Martin, trentenaire, employé de bureau, marié, un enfant. Signe particulier : gamberge beaucoup sur sa vie. Un vendredi soir, au lieu d'aller picoler avec ses collègues ou d'entamer un week-end en famille, ce grand sportif un pleine crise existentielle mâtinée de misanthropie paranoïaque décide de partir pour deux jours de randonnée sauvage, seul dans la nature…
Quasi entièrement en voix off, cet authentique "ego trip" norvégien se révèle une très habile et fidèle mise à nu (physique et morale) de l'homme contemporain. Porté par l'effet hypnotique de l'effort physique, Martin laisse partir son esprit en vadrouille ; en retour, il est assailli sans filtre aucun par un flot de pensées magiques, de souvenirs, d'hallucinations, de fantasmes. Un bouillonnement en apparence décousu, mais qui reprend comme dans l'écriture automatique la logique biscornue des associations d'idées. Ce déferlement de fulgurances mentales erratiques donne l'impression d'être au cœur de la pensée de Martin, embarqué dans son esprit – ce qui n'empêche pas de profiter de la beauté des paysages scandinaves.
Dénué de complaisance, Natür Therapy rappelle l'esprit du Dogme 95 (mouvement cinématographique lancé en 1995 par les Danois Lars von Trier et de Thomas Vinterberg), auquel il ne peut se rattacher, du fait de sa voix off. Saluons l'investissement de Ole Giæver, à la fois devant et derrière la caméra : il prouve qu'on peut tourner un film culotté en ayant les fesses à l'air.
Vincent Raymond