"Le Chagrin" : quand le théâtre fait du vent

Jusqu'à samedi à la MC2, la compagnie Les Hommes Approximatifs présente "Le Chagrin", mis en scène par Caroline Guiela Nguyen. Sous couvert d'une fable touchante sur le deuil, on se retrouve face à une caricature de tout ce que peut recouvrir l'expression théâtre contemporain.


C'est l'histoire d'un mort que personne n'arrive à enterrer. Surtout ses deux enfants, qui réagissent chacun à leur manière. Voilà pour le postulat, à la portée forte et universelle, du Chagrin, spectacle de la compagnie Les Hommes Approximatifs précédé d'une bonne réputation – dont une nomination aux Molières 2015, catégorie "metteur en scène d'un spectacle de théâtre public".

Dans un astucieux décor bleu (une sorte de chambre d'enfant assez effrayante, à moins que ce ne soit un temple pour les morts) chargé en divers accessoires estampillés "jeune compagnie de théâtre dans le vent" (des paillettes, de la terre, des perruques colorées...), quatre personnages jouent la difficulté du deuil alors que la vie, banale, doit continuer. Tout est sur le non-dit, le chagrin du titre étant littéralement enfoui.

Ah, l'écriture au plateau !

Ce Chagrin avait tout pour déchirer le cœur (et pour nous plaire, nous qui défendons sans cesse le théâtre qui cherche à se renouveler, à inventer de nouvelles formes – bref, le théâtre dit contemporain). Sauf qu'aucune force ne se dégage de cette création déroulant tous les clichés possibles de ce fameux théâtre contemporain. Notamment cette « écriture au plateau » visiblement née d'improvisations entre les comédiens (assez inégaux d'ailleurs) qui tourne rapidement à vide, fonctionnant toujours sur le même principe – ils parlent de choses banales avant d'exploser, parce que oui, les êtres humains ont tellement de mal à communiquer.

Mais aussi cette façon de placer sur le côté du plateau les personnages inactifs dans une scène pour leur "faire faire des trucs" (comme lorsque la sœur va se maquiller à vue), ou encore ce besoin de pousser à fond les enceintes en fin de spectacle, façon de matérialiser une tension dramatique absente pendant les 1h30 de représentation.

1h30 au passage pas désagréables – même si, le soir où on les a découvertes, la salle s'est bien vidée ; et l'on a rarement vu d'applaudissements si faibles (juste deux toutes petites salves très gênantes du coup). Non, juste 1h30 qui, malgré ce que l'on s'évertue à nous faire croire, tournent dramatiquement à vide, s'apparentant finalement à un beau foutage de gueule arty.

Le Chagrin, jusqu'au samedi 5 décembre à la MC2


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