The Tiger Lillies, de sombres héros de la mer

Le trio londonien débarque à Grenoble mercredi et jeudi avec "Rime of The Ancient Mariner" (ou "La Complainte du vieux marin"), relecture personnelle du poème de Samuel Taylor Coleridge. Grandiose tant musicalement que visuellement.


Que l'on soit sensible ou pas au côté brechto-waitsien outré de l'étrange punk des Londonien de Tiger Lillies, il convient de leur rendre grâce d'honorer avec The Rime of the Ancient Mariner de Samuel Taylor Coleridge l'un des grands poètes (et critiques) romantiques anglais plutôt méconnu de ce côté-ci de la Manche.

D'abord il faut parler du poème au long cours (c'est le cas de le dire) écrit en 1798 et qui conte dans une atmosphère et une langue proche du gothique la malédiction, racontée en une mise en abyme, si l'on peut dire, d'un navire anglais perdu dans l'Antarctique après que ledit capitaine abattit un albatros – il n'est pas impossible que l'Albatros de Baudelaire, moqué par des marins, soit inspiré de ce poème. Son équipage, désavouant le geste, finit par en devenir complice et se voit décimé par une sorte de menace fantôme (comme diraient les fans de Star Wars), entre vie et mort, « vie-dans-la-mort » comme l'écrit Coleridge, jusqu'à la rédemption finale. Le capitaine aura la vie sauve et sera condamné à faire le récit de cette aventure.

Histoire fascinante aux accents non seulement chrétiens mais aussi christiques (l'albatros comme métaphore du Christ), ulysséens et proto-écologistes que les Tiger Lillies font revivre (c'est le mot) avec la complicité de Mark Holthusen, dans un décor qui doit autant à Tim Burton qu'à l'œuvre de Gustave Doré, par la grâce d'une composition poignante et justement habitée par quelque chose comme des esprits errants.

Stéphane Duchêne

Tiger Lillies - Rime of the Ancient Mariner, mercredi 16 et jeudi 17 décembre à 19h30 à la MC2


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