Les fragments du temps d'Aurore de Sousa

Si la variation est un état de changement, les variations photographiques d'Aurore de Sousa sont surtout un champ d'exploration de la mémoire et de la lumière par une approche esthétique réinventée à chaque série. "Variations choisies 2002-2015" dévoile une sélection de clichés interprétant le temps, à découvrir au Hang'Art. Charline Corubolo


En presque deux siècles d'existence, la photographie n'a eu de cesse d'évoluer et de développer de nouvelles approches du regard. Aux prémices de ce médium aux grandes potentialités, le critique d'art Walter Benjamin évoquait une perte d'aura de l'œuvre du fait de sa reproductibilité, quand plusieurs décennies après le sémiologue Roland Barthes qualifiait cette technique de « ça a été ».

Aurore de Sousa, artiste portugaise et Grenobloise d'adoption, prend le contre-pied de ces deux thèses en déroulant le temps à travers la photographie et en jouant sur sa duplicité pour explorer les différentes facettes d'un même sujet. Avec Variations choisies 2002-2015, actuellement au Hang'Art, la photographe invite le spectateur au cœur d'une œuvre intimiste où les questions de la mémoire, de l'identité et de l'apparition de l'image sont déterminantes. À chaque série, son thème et son dispositif spécifiques, Aurore de Sousa envisageant la photographie comme une mise en scène de l'image.

Mise en abyme

Dans sa quête identitaire, elle use du portrait afin de capter toutes les nuances d'un être. Présentant une multitude de variante, les portraits de sa mère ne sont pas seulement une mise en abyme de la personne mais un positionnement du regard selon différents éléments. Le voile blanc qui passe sur l'image, mouvant, devient la condition du temps qui passe, tandis que la série Lumières (2007) réalisée avec un appareil Polaroïd cherche le point culminant de la lumière qui fera apparaître le visage d'un enfant, dégageant une aura particulière semblable à un rêve. Au gré de ses portraits se dessine ainsi l'univers de la photographe.

Ce parcours identitaire se projette également sur la nature par un jeu de superposition ou d'ouverture. Pour la série Et si la lumière me suivait partout... (2013), l'artiste a encore une fois mis en place une installation spécifique offrant un rendu polysémique. Des motifs de tissus brodés s'entremêlent à des fleurs telle une révélation par la lumière. Dans sa série la plus récente, La terre est faite de ciel (2014), Aurore de Sousa capte le temps du ciel, dont la lumière déploie soit un tableau calme soit un tourbillon coloré, imprégnant le film photographique d'une touche romantique.

Variations choisies 2002-2015, jusqu'au dimanche 24 janvier, au Hang'Art


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