Abd Al Malik : changement dans la continuité

Loin de son image de rappeur bien sous tous rapports, Abd Al Malik revient avec "Scarifications", nouvel album teinté d'électronique, et un rap d'une surprenante intensité.


En dépit de ses 25 années d'existence, le rap français reste encore souvent réduit aux même stéréotypes : d'un côté les « méchants » rappeurs, braillards, immatures, violents, vulgaires et misogynes ; de l'autre les « gentils » rappeurs, sages, conscients, poétiques, bienveillants et bien éduqués. Si cette dernière catégorie peut sembler a priori plus flatteuse, elle n'en reste pas moins un carcan, une sorte de prison dorée étouffante de laquelle il semble difficile de s'échapper. C'est pourtant bien ce qu'a réussi à faire Abd Al Malik avec Scarifications, cinquième album intégralement coproduit avec Laurent Garnier qui le voit s'extirper enfin de son statut de premier de la classe / gendre idéal pour voguer vers de nouveaux horizons.

En choisissant comme écrin une bande-son électronique futuriste tout droit sortie d'un film de science-fiction dystopique, le rappeur semble ainsi clairement trouver un nouveau souffle. Rude, sombre, saccadé, rapide et intransigeant, son rap renoue avec une intensité et un sens de l'innovation insoupçonnés, sans trahir pour autant sa marque de fabrique : une écriture fine, ambitieuse et subtile, qui gagnerait juste à se débarrasser de son épuisante tendance au "name-dropping" littéraire pour emporter pleinement l'adhésion.

Abd Al Malik
À la Belle électrique jeudi 24 mars à 20h30


<< article précédent
Détours de Babel : nos quatre coups de cœur