Truth : le Prix de la vérité

de James Vanderbilt (E.-U., 2h05) avec Robert Redford, Cate Blanchett, Denis Quaid…


Qu'un film consacré, peu ou prou, aux conditions de mise à la retraite d'un vieux crocodile de la TV étasunienne (Dan Rather, c'est PPDA multiplié par Drucker exposant Labro) soit mieux ficelé et plus efficace que Spotlight et son cortège de révélations sordides sur l'Église et la société bostonienne, a de quoi faire rager. Même si, certes, Truth se veut avant tout le portrait d'une productrice de CBS, Mary Mapes, licenciée pour avoir révélé que George W. Bush avait menti sur son passé militaire – la chaîne renvoyant ainsi l'ascenseur à un Président très bienveillant pour son business.

Hélas, l'affaire Mapes n'est qu'un épiphénomène illustrant une tendance que Rather (campé un Redford forcément crédible : il était déjà reporter à l'époque des Hommes du Président), témoin actif, pour ne pas dire complice de l'évolution des médias, commente avec une philosophie désabusée un brin hypocrite. Rather doit en effet sa longévité dans la profession à son adaptation aux mutations d'une information se soumettant de plus en plus aux tyrannies conjointes de la publicité, de l'audience et du spectacle. Même congédié avec les honneurs, l'octogénaire continue de sévir à l'écran, quand Mapes demeure blacklistée.

Si Truth montre comment le cynisme a été intégré comme une vertu naturelle dans la gouvernance pragmatique d'une entreprise audiovisuelle, il révèle également le machisme latent d'un secteur privilégiant les « hommes blancs de plus de 50 ans », ainsi que le notait chez nous la PDG de France Télévisions Delphine Ernotte.

VR


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