Une soirée avec Derrick May, l'inventeur de la techno (oui, oui)

DJ de tout premier plan et auteur de quelques-uns des morceaux les plus emblématiques de l'histoire de la musique électronique ("Strings of life", "Nude Photo", "It is what it is"), l'Américain Derrick May est avant tout connu pour avoir – littéralement – inventé la techno avec ses amis d'enfance. Il est de passage samedi par la Belle électrique.


Belleville, banlieue résidentielle de Détroit, début des années 1980. Pour tromper l'ennui, trois jeunes adolescents noirs, les seuls des environs, écoutent religieusement les émissions de radio d'un DJ local surnommé The Electrifying Mojo. Il faut dire que Charles Johnson, de son vrai nom, ne fait rien comme les autres. Il commence chaque émission par un bruitage simulant l'atterrissage d'un vaisseau spatial, puis enchaîne sans transition dans ses émissions funk psychédélique, électro-pop japonaise et new wave européenne, à rebours de la stricte ségrégation stylistique en vogue dans les radios à l'époque.

En d'autres termes, il crée de toutes pièces son propre univers musical, en recontextualisant et en se réappropriant des courants déjà existants. Et c'est exactement la recette que vont appliquer, quelques années plus tard, ses trois jeunes auditeurs (Juan Atkins, Derrick May et Kevin Saunderson) en inventant ce que l'on appelle aujourd'hui dans le monde entier la techno.

Futurisme et récession

Au milieu des années 1980, lorsqu'ils commencent chacun à sortir les premiers morceaux qui vont définir le genre (pour l'heure encore anonyme), l'usage des synthétiseurs et des boîtes à rythmes est en effet déjà largement répandu au sein de musiques dansantes comme l'italo-disco ou la house music – née quelques années plus tôt dans la ville voisine de Chicago. La principale contribution des  « Belleville Three » va ainsi consister à créer un écrin esthétique et narratif nouveau à leur musique.

En dressant un parallèle entre l'univers des ouvrages de science-fiction et de futurologie dont ils sont friands (notamment La Troisième vague d'Alvin Toffler) et l'atmosphère de décrépitude et de récession post-industrielle dans laquelle est plongée Détroit à l'époque, ils vont ainsi donner naissance à un nouvel afrofuturisme musical, sombre, sauvage et sans concession, qui va rapidement faire boule de neige au sein de la communauté noire de la ville.

Devenu, depuis longtemps déjà, un mouvement uniformisé d'ampleur mondiale, la techno n'a, et c'est somme toute assez logique, gardé que peu de traces de ces prémices 80's évoqués plus haut. On n'en reste pas moins ravis de voir un artiste de l'ampleur de Derrick May venir, de temps à autres, les rappeler à notre bon souvenir.

Derrick May + Cassy + Gab McFly
À la Belle électrique samedi 24 septembre à 23h


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