"La Belle Équipe" : se prom'ner au bord de l'eau avec Gabin

Les cours du cinéma le Méliès reprennent ce jeudi soir avec la projection du film de Julien Duvivier sorti il y a 80 ans. On remonte le fil de l'histoire.


Si vous n'avez de Gabin que l'image d'une silhouette massive de patriarche laconique distribuant à l'occasion une paire de baffes à Annie Girardot ou à Paul Frankeur en rugissant « Tiens donc ! », il vous sera sans doute malaisé de le reconnaître dans La Belle Équipe (1936). Le bougon chenu s'y présente sous les traits d'un titi alerte et jovial, chantant la casquette de travers et en roulant des "R" son plus grand succès d'avant-guerre, Quand on s'promène au bord de l'eau… Mais cette joie de vivre n'est qu'un faux-semblant : le film de Julien Duvivier se révèle d'une noirceur inversement proportionnelle à la gaieté apparente de cette séquence.

Tout débute pourtant sous d'excellents auspices : cinq copains chômeurs (dont Gabin, Vanel et Aimos) gagnent un pécule à la loterie qu'ils convertissent en guinguette. Hélas, la guigne va les poursuivre et la belle aventure tourner au vinaigre – d'autant qu'une perfide donzelle (campée par Viviane Romance) vient semer la zizanie en vampant Gabin. Démarrant comme un conte de fées, La Belle Équipe s'achève dans la tragédie la plus sourde – horrifiant les producteurs qui voyaient dans cette fin un mauvais présage pour le Front Populaire naissant.

Une version alternative plus "heureuse" fut alors consentie par le réalisateur, qui longtemps prévalut jusqu'à ce qu'on rétablisse l'œuvre dans sa forme initiale, désirée par le clairvoyant Duvivier et éminemment symbolique de la triste déconfiture de l'utopie de 1936. C'est à cette version restaurée que vous assisterez dans le cadre de la rentrée du cours de cinéma mensuel de Jean Serroy, dont la thématique cette année est "France / Italie : 10 films oubliés ou méconnus".

La Belle Équipe
Au Méliès jeudi 29 septembre à 20h


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