Guerre des sexes et lutte des classes par Lina Wertmüller

[Mise à jour : Dolce cinema nous annonce que le film ne sera pas diffusé comme prévu, et sera remplacé par "Film d'amore e d'anarchia" sur le même thème et avec les mêmes acteurs]

Objet d'un abyssal remake avec Madonna au début des années 2000 (autant évacuer d'emblée ce douloureux souvenir), Vers un destin insolite sur les flots bleus de l'été fait partie de ces films comme, selon la formule consacrée, on serait bien incapable d'en faire aujourd'hui. Réalisé en 1974 par l'Italienne Lina Wertmüller, il affiche en effet dès son introduction une frontalité sociale terrassante : d'un côté les riches oisifs, réunis sur un voilier le temps d'une croisière entre amis bien nés, et de l'autre les pauvres matelots prolétaires à leur service, chacun détestant l'autre au dernier degré et ne se privant pas de le faire savoir, langage fleuri à l'appui.

Pour autant, lorsque la jeune bourgeoise la plus arrogante du lot se retrouve soudain isolée sur une île déserte avec pour seule compagnie un marin insoumis aussi marxiste que macho, la lutte des classes va progressivement prendre de nouveaux aspects, les rapports de force s'inversant peu à peu pour donner naissance à une nouvelle relation trouble et profondément ambiguë, car entièrement construite autour du diptyque soumission / domination.

Drôle, enlevé, politiquement (très) incorrect et thématiquement passionnant, Vers un destin insolite sur les flots bleus de l'été ne s'enferme pas pour autant dans son seul format de farce acide et vacharde, grâce à une conclusion redistribuant une dernière fois les cartes, et teintant par la même occasion d'une amertume nouvelle l'idylle romanesque à laquelle on vient d'assister.

Vers un destin insolite sur les flots bleus de l'été
À la cinémathèque jeudi 24 novembre à 20h, dans le cadre des Rencontres du cinéma italien