"Une semaine et un jour" : cocotte-minute, sauce demi-deuil

Sa semaine rituelle de deuil accomplie, un couple de quinquagénaires ayant perdu son fils prend des détours baroques pour achever sa consolation. Tout sauf funèbre, cette tranche de vie après la mort est l'œuvre d'un prometteur jeune cinéaste israélien, Asaph Polonsky.


La perte d'un enfant possède la peu enviable réputation de surpasser en abomination tous les chagrins ; d'être également, pour les auteurs les moins scrupuleux (ou les plus crapuleux), un fructueux gisement romanesque. Si Asaph Polonsky a choisi, pour son premier long-métrage, de tourner autour de ce noir sujet, il l'aborde presque à contrepied : en arrivant "après la bataille", c'est-à-dire après le trépas du fils. Il nous épargne la maladie, l'agonie, puis la disparition du corps. Pour autant, la guerre, loin d'être gagnée, ne fait que commencer pour les parents.

La vie, après la mort

En particulier pour le pittoresque personnage du père incarné par Shai Avivi, que l'accablement et la colère vont désinhiber à la manière de Kevin Spacey dans American Beauty : comportements impulsifs face à ses voisins, petites (ou grosses) transgressions en compagnie de leur grand rejeton, semi-fugue… Autant de sorties de routes incongrues, jusqu'à une rencontre fortuite avec la mort – une autre mort – parvenant à lui faire digérer sa révolte et accepter l'inacceptable.

Polonsky se sert du contexte d'un service funèbre pour cristalliser la consolation du père ; d'une oraison qu'il vide de tout message spirituel. Car son film se situe à l'opposé d'un manifeste religieux ou mystique, ancré qu'il est dans le rapport au matériel aux êtres et objets témoignant de la vie : ainsi, c'est en traquant la couverture de son fils, ou en recherchant la proximité de ses amis, que le père empruntera son chemin salvateur. Tout ce qui lui rappellera la vie l'engagera à poursuivre la sienne...

Une semaine et un jour amène à reconsidérer philosophiquement la question de ce qu'on nomme mort : c'est en réalité une "après-vie", une "toujours-vie" pour ceux restent. Et si la béance physique doit se refermer, cela ne veut pas dire que l'absent sera oublié.

Une semaine et un jour
de Asaph Polonsky (Isr., 1h38) avec Shai Avivi, Evgenia Dodina, Tomer Kapon…


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