Dear Criminals : « On veut que l'image transcende la chanson »

Depuis trois ans, les Montréalais de Dear Criminals défrichent la jungle musicale située entre l'électro et la folk. Avec douceur, sensualité et contraste, Frannie Holder, Vincent Legault et Charles Lavoie délivrent une musique cinématographique qui émeut l'ouïe comme la vue. Grâce à eux, le cinéma le Méliès se transformera pour la première fois en salle de concert. Interview.


Au delà d'être un groupe de musique, Dear Criminals est aussi une passerelle, une main tendue vers d'autres arts, comme le théâtre et le cinéma (d'où ce concert au Méliès, avec des images projetées sur écran). Était-ce une volonté de votre part de créer des œuvres multimédias ?

Frannie Holder : En réalité, tout ça s'est fait graduellement. Au fur et à mesure qu'on écrivait, qu'on composait, notre travail plaisait à des gens du cinéma, du théâtre. On souhaite que ça continue longtemps, que les collaborations se fassent naturellement et de façon sincère. En France, de plus en plus de metteurs en scène aiment travailler avec des groupes en live sur scène. Mais on sait que ce sont des modes. Dans quelques années, ces metteurs en scène auront sans doute d'autres envies.

Dans chacun de vos clips, on remarque cette attention toute particulière apportée à l'image. Jusqu'à quel point musique et visuel peuvent-ils être liés ? Sont-ils deux arts complémentaires ?

Ils peuvent l'être ou ne pas l'être. Parfois, les clips sont créés parce qu'aujourd'hui plus personne ne sait s'assoir en silence pour écouter de la musique. Alors on stimule plusieurs sens en même temps pour être capable d'écouter un truc. Mais ça, ça ne nous intéresse pas. Faire une vidéo pour que les gens cliquent puis qu'ils avancent au bout de quinze secondes parce que c'est trop lent, ça ne sert à rien. N'écoute pas dans ce cas !

Notre but, ce n'est pas une conquête mondiale. On fait beaucoup de clips mais on aurait pu en faire encore plus. À chaque fois, on veut juste que notre clip ait une valeur ajoutée. On veut que l'image transcende la chanson. On ne veut pas que l'image soit complémentaire de la musique, on veut créer un objet plus grand que la somme des deux.

Dear Criminals, c'est avant tout l'alliance de deux voix. Comment composez-vous généralement ? Vous partez d'une instrumentale ou d'abord d'une mélodie vocale ?

Souvent, on part des mélodies de Charles ou de moi. On a la chance d'écrire des mélodies qui sont complémentaires lui et moi. Il y a des chanteurs dont j'admire la voix mais dont les mélodies ne me touchent pas. En tant que chanteuse et depuis mon enfance, ce qui fait que je trouve une chanson extraordinaire, c'est sa mélodie. C'est ma compréhension.

Vincent, lui, voit les choses différemment. Il aime une chanson pour ses arrangements, sa recherche du son. Mais on travaille bien ensemble parce qu'on est tous sensibles au travail de l'autre. Ça vient du fait qu'on s'est choisis, qu'on a voulu travailler ensemble. On fait confiance à chacun.

D'où un certain contraste entre la douceur de vos voix et les instruments électroniques qui composent vos chansons...

Nos voix invitent au silence, oui. Elles sont chaudes, alors que les sons électroniques peuvent être considérés comme froids. C'est un mélange qu'on aime nourrir, qui correspond à ce qu'on écrit : on parle beaucoup de l'amour et de la mort, respectivement la chose la plus chaude et la plus froide possible...

Dear Criminals
Au cinéma le Méliès mercredi 25 janvier à 20h30


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