Gore Verbinski : « "A Cure for Life" essaie de pénétrer en vous psychologiquement »

Réalisateur des trois premiers volets de "Pirates des Caraïbes", de "Rango" (2011) et de "Lone Ranger" (2013), Gore Verbinski s'essaie au thriller fantastico-métaphysique avec "A Cure for Life". Rencontre.


Pourquoi avoir situé A Cure for Life en Suisse germanophone ?

Gore Verbinski : Parce que notre influence principal avec le coscénariste Justin Haythe, c'était La Montagne magique de Thomas Mann. Nous voulions l'idée d'un sanatorium en hauteur depuis des siècles, contemplant la société, et qui ait été le témoin de la révolution industrielle, de l'avénement des ordinateurs. En somme, toutes ces choses ayant petit à petit mis l'Homme moderne dans la condition de maladie où il se trouve.

Ce lieu est aussi un endroit de purification, comme une bulle, hors de l'espace-temps : quand l'on s'en approche, les portables ne marchent plus, les montres s'arrêtent, le temps s'écoule dans un registre différent. Lorsque le héros y arrive, il est "ailleurs".

Quelles sont vos autres influences, en particulier cinématographiques ?

Au moment de la production, alors que le film était déjà écrit, l'un des producteurs m'a conseillé de regarder Traitement de choc (1972) d'Alain Jessua que je connaissais pas. Ça m'a beaucoup intéressé, mais ça n'a pas été une influence directe.

Le fil narratif de notre film, c'est la maladie et plus encore, l'inéluctable. On a toujours l'impression que quelque chose existe dans l'ombre, comme une tache noire sur une radio ; une force qui exprime le reflet d'un déni — car notre société est beaucoup dans le déni. J'aime les films qui ont ce sens de l'inéluctable comme Le Locataire (1976) de Polanski, Ne vous retournez pas (1973) de Nicolas Roeg, Shining (1979) de Kubrick ou The Servant (1963) de Losey.

En quoi le cinéma de genre vous intéresse-t-il ?

Quand le rideau se ferme, il y a une distance entre ce que vous avez vu et ce que vous ressentez. Si ce que vous voyez parle à votre âme, quand vous sortez du "traitement" proposé par le film, peut-être que vous aussi, vous allez ressentir des effets secondaires. Par le film, nous essayons de pénétrer en vous psychologiquement ; de faire en sorte que vous soyez le malade. Et de vous confronter à la fin à la question : « Comment vous sentez-vous ? »


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