"Fantastic Birthday" : le changement, c'est maintenant

"Party" de déplaisir pour une adolescente davantage en boutons qu'en fleur, cette allégorie d'un rite de passage emprunte autant au fantastique des contes initiatiques traditionnels qu'aux royaumes mentaux de David Lynch et au décalage de Wes Anderson. Un premier film australien joliment intrigant.


Taciturne et solitaire, Greta va célébrer ses 15 ans. Pour l'aider à se sociabiliser, ses parents organisent une fête d'anniversaire, en conviant toute sa classe… ennemies incluses. Humiliée par icelles, Greta s'échappe dans un terrifiant monde intérieur, où elle apprendra à quitter l'enfance...

L'étrange mutation de l'adolescence : cette phase durant laquelle le mal-être règne en maître ; où non seulement l'ex-enfant se sent étranger dans son propre corps d'adulte en devenir, mais où il peut se trouver rejeté avec cruauté par ses camarades. Empli de souvenirs indistincts aux allures de paradis perdu, son espace intérieur lui apparaît alors comme un refuge… à condition d'en retrouver l'accès.

Dawn under

L'Australienne Rosemary Myers, dont c'est le premier film, nous y fait pénétrer par la voie du conte, l'interface habituellement privilégié pour convertir en créatures merveilleuses ou terrifiantes les pulsions, désirs et angoisses infusant dans l'inconscient de l'enfance – comme Bruno Bettelheim l'a théorisé dans son Psychanalyse des contes de fées. Son approche est ici presque proustienne : grâce à l'attirail du conte, Greta régresse à sa prime jeunesse afin d'y trouver les ressources lui permettant d'accomplir sereinement sa métamorphose.

L'aspect composite de Fantastic Birthday sert alors le propos de la réalisatrice. Quant au contexte australien et aux décors désuets-kitschs façon années 1970, où la moindre roucoulade en français semble d'un exotisme chic, ils créent un déphasage supplémentaire, renforcé par une mise en scène volontairement statique et théâtrale, jouant sur les symétries et les fixités de regards.

Dans cet infra-ordinaire à la Blue Velvet ou La Famille Tenenbaum, tout prend alors une apparence inquiétante. Et l'on partage volontiers l'anxiété de Greta, avant même de basculer dans le segment fantastique, sis en un univers parallèle cousin de ceux Lost Highway ou de Twin Peaks. Excellemment interprété par un aréopage de jeunes interprètes, Fantastic Birthday nous rappelle au passage que le cinéma des antipodes, lui non plus, n'a pas fini de grandir…

Fantastic Birthday
de Rosemary Myers (Aus., 1h20) avec Bethany Whitmore, Harrison Feldman, Eamon Farren…


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