"120 battements par minute" : charge virale

de Robin Campillo (Fr., 2h20) avec Nahuel Perez Biscayart, Arnaud Valois, Adèle Haenel…


Histoires de révoltes et de combats. Celles des militants d'Act Up Paris à l'orée des années 1990 pour sensibiliser à coups d'actions spectaculaires l'opinion publique sur les dangers du sida et l'immobilisme de l'État. Et puis la romance entre Nathan et Sean, brisée par la maladie…

Grand Prix à Cannes, ce mixte d'une chronique politique et d'une histoire sentimentale est aussi une autobiographie divergée de son réalisateur Robin Campillo. Ancien membre d'Act Up, il a toute légitimité pour évoquer le sujet de l'intérieur, en assumant sa subjectivité, et tenant compte du temps écoulé. Le portrait collectif qu'il signe n'est ainsi ni un mausolée aux victimes, ni un panégyrique aux survivants, ni un documentaire de propagande : il s'inscrit dans un contexte historique, à l'instar d'un conflit armé. Campillo emprunte d'ailleurs sa construction aux films de guerre, chaque génération ayant les siennes – les AG étant les réunions d'état-major avant les actions et manifs ; le champ de bataille les lieux d'intervention. Sauf qu'il y a ici deux guerres à mener : l'une, visible, contre les institutions et les labos pharmaceutiques ; l'autre, intime, contre le virus. 

Sans nier les mérites de ce 120 battements par minute, on peut toutefois préférer la vision complémentaire de ces années maudites portée par Téchiné dans Les Témoins (sans doute l'un de ses plus grands films), qui insistait sur le désemparement médical et l'urgence, quand Campillo s'attache à montrer ici la colère et l'accomplissement d'un deuil.


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