Jane Campion : piano-forte

La Cinémathèque de Grenoble consacre un court cycle à la cinéaste néo-zélandaise. Et l'ouvre jeudi 11 janvier avec la cultissime (et primée à Cannes) "Leçon de piano".


À chacun sa croix. Bernard Hinault, Marie Myriam et Régis Wargnier partagent l'insigne privilège d'être les derniers Hexagonaux à avoir remporté un trophée (Tour de France 1985, Grand Prix de l'Eurovision 1977, Oscar du meilleur film étranger 1993) dans leur discipline il y a au moins un quart de siècle. Il en va de même pour la Néo-Zélandaise Jane Campion qui demeure à ce jour la seule réalisatrice récipiendaire de la Palme d'or du Festival de Cannes avec La Leçon de Piano (ex-aequo d'ailleurs avec Adieu ma concubine de Chen Kaige).

Certes, la cinéaste doit en avoir assez qu'on le lui serine – voire, pire, qu'on réduise sa carrière à cette prestigieuse distinction. Mais au-delà d'un manque d'inspiration des chroniqueurs ou de la sempiternelle question de la sous-représentation des autrices dans les palmarès cannois, La Leçon de Piano évoque justement, à l'instar de la plupart des films de Jane Campion, la condition de femmes singulières, confrontées ici à la rudesse d'un monde patriarcal et fruste. 

Holly Hunter y campe une veuve écossaise et muette, mariée par son père à un colon des antipodes. Disposant pour communiquer d'un piano et de sa jeune fille, elle va rencontrer l'hostilité d'un époux cupide (Sam Neill) et la passion charnelle dans les bras d'un voisin sauvage, proche des Maoris (Harvey Keitel). Mélange de classicisme austère, de grandiloquence (la séquence du tranchage de doigt !) et d'abandon hypnotique (les ensorcelantes mélodies répétitives de Michael Nyman y sont pour beaucoup), La Leçon de piano tient du monument conscient de sa grandeur. Un monument figé dans le sable d'une plage, sous un ciel d'écume blanche, et qui se visite désormais dans une copie numérique restaurée.

Le film ouvre, à la Cinémathèque, un bref cycle Jane Campion, qui se poursuivra vendredi 19 janvier avec la projection de son premier long-métrage, Sweetie.

La leçon de piano
À la Cinémathèque jeudi 11 janvier à 14h30 et 20h


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