"In the Fade" : Diane Kruger, tout simplement

de Fatih Akın (All.-Fr., 1h46) avec Diane Kruger, Denis Moschitto, Numan Acar…


Allemagne, de nos jours. Katja a épousé Nuri, un commerçant d'origine turque, jadis petit délinquant mais rangé des voitures depuis qu'ils ont eu leur fils Rocco. Leur bonheur familial est brusquement réduit à néant quand un attentat perpétré par des nazis tue Nuri et Rocco…

Depuis Head On (2004), on sait qu'il faut compter avec Fatih Akin, sur les épaules de qui pèsent la plupart des espoirs placés dans le renouveau du cinéma allemand, après le malheureux feu paille Florian Henckel von Donnersmarck (réalisateur du fameux La Vie des autres). Avec ce film complexe à l'indiscutable maîtrise (successivement une tragédie, un film de procès et un "revenge movie"), Akin embrasse sans barguigner la somme des réalités contemporaines d'outre-Rhin – notamment la résurgence d'activistes nazis décomplexés.

Il signe en sus un bouleversant portrait de femme dans toutes les acceptions organiques du terme, offrant à Diane Kruger son premier réel grand rôle dans sa langue maternelle. Le fort signifiant politique de ce retour aux sources artistique – dûment distingué à Cannes par un Prix d'interprétation féminine – lui confère une étiquette de comédienne engagée. Il serait cependant injuste de la réduire à cette dimension, même si on doit pas en faire abstraction.

Coquille vidée de sa substance avec la mort de ses proches, le personnage de Katja est la proie d'une lutte intense pour consentir à survivre, qui passe par l'exploration de maintes options, dépeinte par Akin avec tact et élégance. Prise en étau entre pulsion de vengeance et désir d'abandon, Katja goûte à d'épouvantables saveurs : haine, envie, jalousie, abandon… Une mosaïque de sentiments dessinant un être loin d'être parfait, flirtant avec l'ombre, en proie aux doutes mais, à la différence de ses bourreaux, humain.


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