Theo Lawrence & The Hearts : comme un (bon) goût de contrebande

À l'écoute de "Homemade Lemonade", premier album de Theo Lawrence & The Hearts, on pourrait croire qu'il y a, du côté de Gentilly, Val-de-Marne, comme un petit goût de contrebande de l'Amérique d'une autre époque, celle de l'âge d'or de la soul, du blues et de tout un tas de musiques roots. Mais ce serait sous-estimer l'inventivité d'un groupe qui aux recettes toutes faites préfère les élans du cœur, comme on le découvira jeudi 29 mars sur la scène de la Source.


Dans les lieux fantasmés du road trip américain d'où provient en droite ligne la musique de Theo Lawrence & The Hearts, à commencer par le sud profond, la boisson maison est traditionnellement un alcool de contrebande que l'on nomme poliment "moonshine" en référence à une production réalisée à la lumière de la lune – rapport à la légalité toute relative de l'activité. Sauf que Theo Lawrence & The Hearts, la vingtaine à peine, ne sont pas nés sous ces horizons là mais à Gentilly, dans la banlieue parisienne, et que le dénommé Theo à qui l'on doit ce groupe s'était juré adolescent de donner ce titre à son premier album – si par bonheur il en sortait un un jour.

Ce titre, c'est Homemade Lemonade, et il n'empêche pas de penser, lorsque l'on écoute ce qui se cache derrière, que Theo Lawrence & The Hearts sont une fameuse bande de contrebandiers. Qu'entre Gentilly, où leurs morceaux ont été écrits, et Angers, où ils ont été enregistrés au studio Black Box, en tout analogique, le groupe s'est livré à un bel exercice de restitution de tout ce qui se fait de mieux en musique roots de l'autre côté de l'Atlantique : soul à forte teneur en ivresse et en romantisme farouche, blues mordant tout ce qui bouge entre Détroit et le delta, country rock lorgnant vers le garage...

Recette secrète

C'est que Theo a, dès l'enfance, eu une révélation à la découverte des White Stripes. Et connaît aussi par cœur le bréviaire bluegrass, deep soul et le chemin qui sépare Nashville de Memphis. Sa voix, à l'aise dans tous ses états (d'Amérique), capable de sonner comme un apôtre soul, un pasteur hillbillie ou le fantôme de Roy Orbison, est pour beaucoup dans la réussite d'une affaire qui ne verse pas pour autant dans l'exercice de style nostalgique.

D'autant que les influences du groupe ne s'en tiennent pas au pré carré américain, et explorent aussi le rock cambodgien, la musique jamaïcaine et tout un tas de traditions et autres modernités, ce qui donne une couleur particulière à l'ensemble. Une toute autre limonade que celle qu'on peut parfois entendre dans les replis de la geste revival.

Theo Lawrence & The Hearts + Duck Duck Grey Duck
À la Source jeudi 29 mars à 20h30


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