Quand quelqu'un d'important meurt, il n'est pas rare que l'on aille interroger la dernière personne à l'avoir vu vivante (chauffeur, brancardier, voisin, ami...), comme si cela pouvait permettre de prolonger quelque peu sa présence, de racler les fonds de tiroir du souffle de la vie, de transposer un peu du regretté dans cet ultime témoin. Le jazzman Donny McCaslin fut un peu cette personne lors du décès début 2016 de la légende David Bowie. Lorsque ce dernier s'est envolé, tous les médias sont tombés sur McCaslin, qui avait forcément quelque chose à raconter. Car à 50 ans, ce saxophoniste au solide CV, tombé dans le jazz enfant, formé à l'Institut Berklee et trois fois nommé aux Grammys, est surtout connu depuis deux ans comme "le dernier saxophoniste" de David Bowie.
En 2015, il participait en effet à l'enregistrement de Blackstar, l'album testament du Thin White Duke (qui l'avait pour ainsi dire recruté avec son quartet après un concert dans un club new-yorkais) ; expérience qui, il l'avoue bien volontiers, a changé sa vie. Au point que, dans le sillage de cette "étoile noire", McCaslin, partisan d'un jazz fusionnant musiques électroniques et improvisées, encore terriblement marqué par cet épisode artistique et humain de sa vie de musicien, a composé Beyond Now (2016), hommage à Bowie (avec deux reprises de morceaux anciens) et à son ultime œuvre. Et d'une manière certaine, il en a récolté la lumière encore bien vivante, repoussant les limites du jazz et de la mort, tout en se donnant les moyens de passer à autre chose.
Donny McCaslin
À la MC2 mercredi 16 mai à 19h30