Le dernier "à Dieu" d'Arcabas

Le peintre français, figure de l'art sacré exposée aussi bien en France qu'à l'étranger, est mort à l'âge de 91 ans à Saint-Pierre-de-Chartreuse. On lui doit notamment les œuvres du Musée d'art sacré contemporain de Saint-Hugues-de-Chartreuse.


Arcabas ne promènera donc plus son regard malicieux sur ses œuvres du Musée d'art sacré contemporain de Saint-Hugues-de-Chartreuse ou sur les vitraux de la basilique du Sacré-Cœur de Grenoble, dont il poursuivait, à plus de 91 ans, la réalisation. Jean-Marie Pirot, dit Arcabas, s'est en effet éteint ce jeudi 23 août à son domicile de Saint-Pierre-de-Chartreuse, entouré de ses deux enfants, Étienne, sculpteur, et Isabelle, écrivaine et dramaturge.

Né en 1926 en Moselle, le jeune Jean-Marie connaîtra avec tant d'autres les affres de la guerre, enrôlé de force dans l'armée allemande. Une épreuve dont il ne parlait jamais, mais qu'il est difficile de ne pas relier à sa « conversion » à cette « foi joyeuse » qu'il aimera tant peindre.

Après les Beaux-Arts de Paris, le jeune Jean-Marie se retrouve en poste à Grenoble, où son épouse Jacqueline est l'une des toutes premières psychologues scolaires. C'est l'époque du plateau d'Assy, où le père Couturier, pour qui « tout art véritable est sacré », convie Matisse, Braque, Chagall, Bonnard, Lipchitz ou encore Richier à décorer Notre-Dame-de-Toute-Grâce.

Une église sinon rien

Jean-Marie Pirot cherche lui aussi une église, mais dont il s'emparera seul « pour plus d'unité ». Tombé un peu par hasard, et alors qu'il commençait à se décourager, sur Saint-Hugues-de-Chartreuse, il convainc le père Truffot, un ancien prêtre ouvrier, et Auguste Villard, le maire conservateur, de lui confier cette petite église.

Avec ses étudiants, Pirot mène une première campagne, qui se terminera par l'accrochage de plus de 140 m2 de toile de jute peinte (les murs se révélant trop humides pour accueillir les fresques initialement projetées), la réalisation des vitraux et l'installation d'un premier mobilier liturgique.

Artiste invité outre-Atlantique en 1969 par le Conseil national des arts du Canada, Jean-Marie Pirot, qui est devenu Arcabas, s'étonne à son retour en 1972 de « l'austérité » de son œuvre. C'est la réalisation du Couronnement, suivi, au beau milieu des années 1980, de la prédelle. Son œuvre sur place, commencée en 1953, est alors officiellement terminée en 1986.

Michel Couëtoux, vice-président (PCF) du Conseil général de l'Isère, en charge de la culture, et Louis Mermaz, son président (PS), lui permettront d'assurer la pérennité de l'ensemble par une donation au Département qui transformera ipso facto l'église (elle reste consacrée) en musée départemental.

Mais Saint-Hugues-de-Chatreuse n'est pas sa seule réalisation. Travaillant dans le monde entier, Arcabas refusera plusieurs fois la commande des vitraux de la basilique de Sacré-Cœur, à Grenoble – le plus grand chantier de cet ordre en France. Et ce n'est qu'assuré que le maître-verrier Christophe Berthier pourrait terminer cette œuvre « en cas de malheur » qu'il se laisse finalement convaincre. De Saint-Hugues au Sacré-Cœur, la boucle était bouclée…

Ses obsèques seront célébrées le mardi 28 août à 11 h en l'église Saint-Hugues-de-Chartreuse.


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