Mix à contre-courant avec DJ Normal 4

Membre d'une scène européenne émergente en pleine ascension depuis quelques années, l'Allemand DJ Normal 4 ressuscite dans ses DJ-sets foisonnants les trésors cachés des mouvances musicales les plus obscures des décennies passées. On a échangé quelques mots avec lui en amont de son passage à la Bobine mardi 2 octobre, à l'invitation de The Dare Night.


Pour le commun des mortels, la scène "breakbeat hardcore" anglaise du début des années 1990 n'évoque sans doute pas grand-chose. Intimement lié au phénomène des raves sauvages alors en pleine effervescence en Angleterre, ce genre éphémère, qui allait donner naissance à la plus populaire jungle quelques années plus tard, prenait la forme d'une vaste matrice musicale où se croisaient influences hip-hop, reggae et acid-house sous un véritable déluge de samples, de rythmes et d'infrabasses.

Aux côtés d'une poignée d'autres artistes comme Luca Lozano, fondateur du label Klasse Wrecks, DJ Normal 4 est l'un des premiers DJs à avoir remis ce style au goût du jour, comme il nous l'a expliqué. « J'adore l'absence de frontières propre à ce style : on y entend les prémices de la jungle, des influences reggae, des samples vocaux qui rappellent Mickey Mouse, mais aussi des basses sombres et inquiétantes, des sonorités futuristes… C'est vraiment le genre que j'ai le plus exploré ces derniers temps. »

Mais certainement pas le seul. Après avoir fait ses débuts de manière plus conventionnelle (« j'étais vraiment le prototype du DJ house/disco/techno classique qui mixe pendant des heures au même tempo »), Tim Schumacher de son vrai nom s'est fait une spécialité de mettre en lumière des genres aujourd'hui oubliés. « Dans mes sets, tu peux entendre des vieux classiques de la house, mais aussi du dub, du dancehall des années 1980, de la disco, de l'IDM, de la proto-trance, de l'électro, de la jungle… »

Il était une fois à Düsseldorf

Ce goût pour la découverte et le décloisonnement, DJ Normal 4 le doit en bonne partie à sa fréquentation assidue d'un lieu un peu hors norme, le Salon des amateurs, club mythique de Düsseldorf. « Au début, c'était simplement le bar de la Kunsthalle, une salle d'exposition de Düsseldorf, mais grâce à la curation musicale d'artistes comme Tolouse Low Trax et plus tard Lena Willikens, c'est devenu une sorte de club avec une atmosphère vraiment spéciale. Un lieu d'échange musical où les gens pouvaient danser, mais où l'objectif n'était pas de remplir le dancefloor à tout prix. Du coup, lorsque des DJs de premier plan étaient invités, ils faisaient souvent des sets très différents que ce qu'ils auraient pu faire dans des gros clubs comme le Berghain à Berlin par exemple. C'est devenu une sorte de salon au sens classique du terme, où les gens qui partageaient un état d'esprit commun, légèrement en marge de la norme, pouvaient se rencontrer. J'y ai été pour la première fois en 2009, et j'ai flashé instantanément. »

Du Salon des amateurs aux artistes de son label Aiwo Rec en passant par le précité Luca Lozano ou encore les activistes lyonnais de Brothers From Different Mothers, DJ Normal 4 s'est ainsi créé au fil du temps une sorte de famille d'adoption reliée par des affinités musicales communes et une insatiable curiosité. Une petite scène encore méconnue du grand public, mais dont l'influence souterraine ne cesse de croître avec les années.

DJ Normal 4
À la Bobine mardi 2 octobre à partir de 19h30


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