"Chris the Swiss" : tombeau pour être vrai

de et avec Anja Kofmel (Sui-Cro-All-Fin, 1h25) avec également Heidi Rinke, Julio César Alonso…


Parti couvrir le conflit yougoslave pour la radio suisse, le jeune Christian Würtenberg est retrouvé mort en 1992 revêtu de l'uniforme d'une milice pro-croate. Marquée à l'époque par sa disparition, sa cousine enquête de nos jours sur ce héros de roman et son assassinat…

Aux yeux d'enfant d'Anja Kofmel, Chris était nimbé d'un séduisant mystère, accomplissant une noble mission "à l'autre bout du monde". La vérité est aussi nuancée que ce personnage aux motivations incertaines : était-il, comme le prétend doucereusement le terroriste Carlos, un espion suisse ; s'était-il infilitré dans la faction paramilitaire d'extrême-droite pour en raconter l'existence en journaliste ? Ou bien avait-il, en homme désarçonné par les atrocités observées, réellement décidé de combattre les Serbes en renonçant à sa double neutralité, helvétique et journalistique ? Dans son for intérieur, Anja avait sa réponse ; elle fait donc en sorte de donner de Chris un portrait respectable – sans doute conforte à la réalité. 

Au-delà d'une nécessité personnelle, sa démarche se distingue par un mélange de prises de vues réelles contemporaines traduisant son enquête de terrain, d'archives et de séquences d'animation en noir et blanc mêlant reconstitutions d'images manquantes (ce que l'on suppose) ainsi que de visions métaphoriques (l'obscène de la guerre, transfiguré pour être représentable). S'il se comprend et se conçoit en tant que projet théorique, le résultat déconcerte : on eût préféré 100% d'animation.


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