Il était une fois L'Art partagé, « musée éphémère de l'art brut »

Depuis bientôt quinze ans, Jean-Louis Faravel se passionne, à Rives, pour l'art brut et l'art singulier. Au point de proposer une biennale, baptisée L'Art partagé, autour de « l'art des fous » (mais pas que…) dont c'est, jusqu'au dimanche 18 novembre, la septième édition. Nous l'avons visitée.


On a trop souvent traduit le "Beati pauperes spiritu" des Écritures par "Heureux les simples d'esprit", alors que ces vocatifs et ablatif signifient plutôt "Heureux les pauvres par leur esprit", ou "Heureux ceux qui ont su garder un esprit de pauvres"… Loin de l'herméneutique (cette science de l'interprétation des textes, religieux notamment), le rapport à la création artistique de personnes souffrant de troubles mentaux semble relever du même ordre, obéissant au même type de principe(s). L'art brut serait-il plus proche de l'authenticité ? C'est en tout cas le propos qu'entend illustrer, mieux qu'un long discours et non sans bonheur, la septième biennale L'Art partagé que Rives accueille jusqu'au 18 novembre.

Salle François-Mitterrand, 64 artistes de sept nationalités (principalement Néerlandais et Français, mais également Allemands, Belges, Italiens, Portugais et Indonésien) le prouvent à l'envi, à l'aune de quelque 800 œuvres. Si tous ne sont pas en institution, ce charme singulier opère (presque…) à chaque fois.

« Une présence, un passage »

Dans ce que Jean-Louis Faravel, à l'origine de cette biennale, a conçu comme un « musée éphémère de l'art brut », quelques signatures crèvent l'écran, dans des registres très divers.  Au premier rang desquelles, peut-être, celle de Lucas Gerbinet, qui vient dire au stylo bille « une présence, un passage » (pour citer le joli texte de l'écrivain isérois Emmanuel Merle), mais aussi un mouvement, une énergie dont les compositions diffractées claquent avec l'évidence d'un manifeste. On pourrait d'ailleurs ne plus être dans l'art brut tant ça fonctionne…

Au chapitre des compositions plus poétiques, on retiendra Béatrice Elso, dont les boîtes disent toute la délicatesse de ces univers intérieurs, et Gilles Manéro, dont les différentes techniques d'expression semblent toujours sonder l'infinie profondeur des limbes en tout genre. Et pendant que Viriginie Chomette paraît tisser d'improbables liens entre Gustav Klimt et Annette Messager, qu'Hubert Duprilot s'affirme loin du peintre frabçais Jean Rustin, Daniel Gonçalves s'emploie à tordre la notion même de symétrie pour en extraire les contradictions, alors que Markus Meurer sculpte les rebuts de la technologie jusqu'au crucifix, un peu sur le mode d'un Alan Vega.

Priscille Deborah, Éric Demelis, Nicole Pessin, Marie-Jeanne Faravel, Luuk Geerts et Irène Gérard viendront enfin compléter cette sélection non exhaustive.  

Et si cet ensemble vous semble parfois présenter des allures de capharnaüm, prenez le temps de chiner jusqu'au "cabinet de curiosités". Les fêtes approchent, et il n'est pas interdit de (se) faire plaisir…

7e Biennale de l'Art partagé
À Rives jusqu'au dimanche 18 novembre


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