Julien Beneyton ou le souci du détail contemporain

Avec une sélection de tableaux balayant les vingt premières années de la carrière de Julien Beneyton, peintre quarantenaire né à Échirolles et aujourd'hui installé à Paris, l'exposition "Retour vers le futur" du Vog présente l'univers singulier d'un artiste qui fait cohabiter cultures populaires et tradition picturale.


Si Maurice Utrillo était né un siècle plus tard, il aurait tout à fait pu peindre La rue Jules-Cloquet, tableau qui nous accueille en ce moment au Vog. Car Julien Beneyton (qui l'a réalisé) partage avec son aîné, figure majeure de la scène artistique montmartroise de l'entre-deux-guerres, une même fascination pour les pavés déglingués, les murs de guingois et tout ce qui caractérise le versant populaire du XVIIIe arrondissement parisien – quartier où tous deux ont vécu. Datée de 1999, cette œuvre, la plus ancienne de l'exposition, annonce la couleur : qu'il soit à New York, Paris ou Oujda, Julien Beneyton a un attrait pour les quartiers populaires et la vitalité de leurs cultures.

Réalisé en 2013, le panorama intitulé Oujda présenté plus loin s'inscrit également dans cette veine, en témoignant par ailleurs de l'évolution notable du style du peintre. L'apparente maladresse des débuts laisse ainsi place à une touche picturale d'une grande précision qui permet de scruter intensément la représentation : notre regard peut tout autant examiner les poils de barbe des personnages au premier plan que déceler les taches d'humidité sur les murs des bistrots en arrière-plan.

Au-delà du réel

Pour obtenir une telle profusion de détails, Beneyton s'appuie sur des centaines de photographies qui lui permettent d'amplifier sa saisie du réel au point que, dans ces scènes de rue, chaque personnage est méticuleusement portraituré. Évoquant tour à tour Maurice Utrillo, donc, ou le réalisme des maîtres flamands (par ce souci du détail), l'artiste se nourrit des peintres du passé pour traiter de la culture populaire contemporaine, rendant simultanément hommage au cinéaste Robert Zemeckis (à qui l'exposition emprunte le titre de sa fameuse trilogie) et à Charles Baudelaire en appliquant l'injonction faite par le poète aux peintres modernes de « tirer l'éternel du transitoire ».

Une exposition riche qui, en bonus, et en guise de respiration dans le couloir du Vog, propose également un  amusant triptyque de très petits formats sur la résurrection d'une tortue prénommée Ninja et une mini-installation en trompe l'œil. Ouvrez le vôtre !

Julien Beneyton – Retour vers le futur
Au Vog (Fontaine) jusqu'au samedi 2 février
Rencontre avec l'artiste vendredi 21 décembre à 19h


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