"Le Retour de Mary Poppins" : Mary à tout prix (et pareille à elle-même)

De Rob Marshall (ÉU, 2h10) avec Emily Blunt, Lin-Manuel Miranda, Ben Whishaw…


Trente ans se sont écoulés depuis le départ de Mary Poppins. La voici de retour, quasi identique, pour s'occuper des enfants de Michael Banks, alors que leur père, jeune veuf, s'emploie à sauver leur maison d'une saisie. Heureusement, sa magie sera le sucre qui aidera la médecine à passer…

Disons-le tout net, cette suite est une délicieuse mine de paradoxes. Tout d'abord parce qu'elle s'applique davantage à répliquer l'opus initial qu'à le prolonger, histoire de montrer l'immutabilité de la nounou – laquelle, pourtant, a changé de physionomie en changeant d'interprète (Emily Blunt). Ainsi le ramoneur est-il ici remplacé par un allumeur de réverbères (même genre de monte-en-l'air, en plus propre sur lui) ; l'oncle Albert s'envolant au plafond troqué par une cousine Topsy vivant tête-bêche ; la séquence champêtre en animation par… une séquence champêtre en animation (avec une touche de cabaret en sus). Bénéficiant des évolutions techniques contemporaines, cette Mary Poppins est donc plus une 2.0 qu'une n°2.

Mais si la trame se conforme à l'original, cet épisode se distingue sur un point : son contenu plus engagé socialement et politiquement (du moins en apparence) que le précédent. D'abord, Jane reprend ici le flambeau de sa suffragette de mère en s'affichant en pantalon et militante travailliste. Ensuite, la majeure partie du film développe une critique sourde à l'encontre des pratiques rapaces des banques, se repaissant de la misère de clients affaiblis par la Dépression. On suppose l'allusion à la crise des subprimes, une dénonciation des ponctions frauduleuses des banksters, voire une charge décroissante contre le libéralisme. Las ! Dans les ultimes minutes, la délivrance des malheureux protagonistes interviendra grâce à un deus ex machina en redingote. Sa profession ? Banquier et chantre de du compte-épargne. Dommage, on aurait bien aimé finir sur une note anar.


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