Decibelles : rock française

En co-plateau avec les post-hardcoreux américains Hot Snakes, le trio lyonnais Decibelles viendra livrer à l'Ampérage et en bloc des extraits de "Rock Français", son dernier album emballé par le mythique producteur Steve Albini. Où humour noir et punk coloré se frictionnent à l'envi.


C'est à Grenoble que les Lyonnaises de Decibelles (qui comptent aujourd'hui un homme dans leur line-up) ont donné leur premier concert. C'était il y a une bonne décennie. Fanny Bouland et Sabrina Duval avaient alors 16 ans et avaient frôlé la catastrophe, confrontées à toutes les avanies technico-tactiques possiblement endurables en un seul et même concert. Le genre d'expérience qui incite davantage à débrancher les guitares et à les revendre sur eBay qu'à remonter sur scène, ne serait-ce qu'une fois.

Pourtant, depuis, les filles, qui ne goûtent que modérément qu'on les assigne au statut de "groupe de rock de filles", ont non seulement persévéré mais, surtout, fait pas mal de chemin. Plus d'une centaine de concerts, une poignée d'EPs, un premier album en 2017, Tight, et un deuxième publié il y a quelques semaines enregistré chez le sorcier à salopette du noise-rock en personne : Steve Albini (dont elles ont fait quelques premières parties lorsque celui-ci tournait en Europe avec son groupe Shellac).

Manger son ex

La chose s'appelle Rock Français et donne un bel aperçu de la discipline, même si le disque en manque cruellement, de discipline. Rock Français car, pour la première fois, les Decibelles ont choisi de ne chanter que dans la langue de Molière. Une langue néanmoins sévèrement assaisonnée, furieusement salée, sacrément piquante et souvent très drôle – il le faut pour percer les déflagrations de guitares qui bâtissent ce mur du son sec, métallique, coupant, comme un monument à la tension. Ici par exemple, on tranche la question de savoir si l'on peut Manger son ex (la réponse est évidemment oui), on assume d'affectionner la solitude extrême (Je suis seule), et on se livre sans ambages à une déclaration d'amour excessif à son clitoris (J'aime trop mon clito).

Dans l'esprit plus que dans l'esthétique, les Decibelles évoquent (qu'elles nous pardonnent pour cette comparaison féminine, pour ne pas dire féministe) un pendant français des Slits d'Ari Up, formées tôt dans l'adolescence et que, il y a quarante ans, pas grand-chose n'arrêtait non plus.

Hot Snakes + Decibelles
À l'Ampérage vendredi 31 mai à 20h


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