L'Arpenteur : « Offrir une vision alternative du monde »

Niché dans la montagne près de Grenoble (aux Adrets-en-Belledonne pour être précis) et sous-titré « théâtre pentu et parole avalancheuse », l'Arpenteur est l'un des festivals les plus singuliers de la région, mêlant propositions culturelles classiques et formats plus atypiques en lien avec ce territoire géographiquement particulier. Zoom sur ce que nous réserve sa 24e édition en compagnie du directeur artistique Antoine Choplin.


C'est un festival petit par la taille (logique, il est organisé dans la montagne, entre Grenoble et Chambéry, et dans des espaces à taille humaine – un parc, une salle de mairie, une cour d'école…) mais grand par ses ambitions. Car on l'écrit chaque année, mais l'équipe de l'association Scènes obliques qui le porte depuis plus de 20 ans construit son Arpenteur avec la même exigence qu'une scène nationale implantée en ville, là où l'on imagine plutôt (à tort sans doute) ce genre d'aventure.

Un territoire particulier qui, forcément, joue sur la programmation comme nous le confirme Antoine Choplin qui pilote l'aventure. « Cette montagne, c'est ce qui fait l'ADN du festival depuis l'origine avec ce paysage à la dimension clairement poétique. Et même, parfois, un peu politique par cette capacité qu'ont nos montagnes à offrir à nos regards une vision alternative et différente du monde. L'altitude permet de prendre un peu de distance, de regarder les choses de loin et autrement. »

Chemins de traverse

La programmation de l'édition 2019, regroupée sous la thématique "(se) construire" (« avec ce pronom réfléchi entre parenthèses, on ouvre autant à la construction qui préside au travail de l'artiste – d'un texte, d'un spectacle, d'un film… – qu'à la construction intime qui agit pour, on l'espère, les spectateurs présents »), parle ainsi d'elle-même. « On cherche une forme de résonnance entre le propos des artistes et cette sorte de mise à distance du monde. Et ça fonctionne quand l'artiste est lui-même prêt à jouer le jeu de cette aventure un peu à l'écart des chemins habituels dédiés à la culture. »

Côté spectacles, citons par exemple les fameux Tréteaux de France, centre dramatique national itinérant piloté par Robin Renucci, et leur spectacle L'Enfance à l'œuvre fait de textes de Romain Gary, Marcel Proust, Arthur Rimbaud et Paul Valéry (« un sujet complètement dans la thématique de cette année sur la question de la construction à travers des épisodes marquants de l'enfance piochés dans la grande littérature ») ; un ciné-concert par l'ensemble musical Diallèle sur le Jour de fête de Jacques Tati ; un concert du groupe Debout sur le Zinc autour de chansons de Boris Vian ; un autre de la musicienne Cora Laba qui livrera ses Échos d'Ukraine (elle a été « propulsée » en plein cœur de la révolution)…

Ou encore la présence du chorégraphe Jordi Galí qui dévoilera plusieurs de ses installations-performances captivantes élaborées sous nos yeux. « Il fait partie des artistes qui ont accepté de jouer le jeu du festival. Ciel, l'un des deux spectacles qu'il donnera à l'Arpenteur, sera ainsi présenté à plus de 1700 mètres d'altitude, proche du ciel justement. Il est venu en repérage une journée, on est allés marcher ensemble là-haut… »

L'Arpenteur, c'est donc un festival pluridisciplinaire haut de gamme qui, terrain montagnard oblige, s'écarte également des sentiers traditionnels avec plusieurs détours atypiques – des marches en compagnie d'artistes, un concert dans un refuge, un banquet pentu en clôture… Et un festival qu'on prend plaisir à rejoindre chaque été comme il offre aux spectateurs un cadre de vue splendide et des moments hors du temps et de l'agitation urbaine. Plus que nécessaire.

L'Arpenteur
Aux Adrets-en-Belledonne (Isère) du vendredi 5 au samedi 13 juillet


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