Le second souffle de la Casamaures

On l'aperçoit quand on arrive à Grenoble depuis Lyon. La villa orientale la Casamaures, située à Saint-Martin-le-Vinoux, a été sélectionnée pour le Loto du patrimoine de Stéphane Bern. De quoi donner un nouvel élan aux projets de restauration engagés depuis 38 ans par sa propriétaire, Christiane Guichard. On l'a rencontrée.


Une fois la porte du domaine poussée, on découvre le jardin luxuriant d'un côté et l'imposante bâtisse orientale de l'autre. Puis on se laisse emporter par l'enthousiasme de la propriétaire, Christiane Guichard. Une artiste haute en couleur, à l'image de sa demeure, la Casamaures, construite de 1855 à 1867 par le Grenoblois Joseph Jullien – qui finit ruiné ! Cette dernière fait partie des 103 sites retenus pour la deuxième édition du Loto du patrimoine porté par Stéphane Bern. Christiane Guichard l'a appris le 11 juin dernier par une journaliste. « Un véritable quiproquo ! Je ne comprenais rien, je croyais que j'avais gagné au loto alors que je ne joue pas. Quand j'ai enfin compris, j'ai poussé un cri de joie ! »

Tout est parti d'une mission d'étude en 2018 qui révèle trois chantiers prioritaires : la réfection de peintures au plafond, la restauration des vitres du jardin d'hiver et la reconstitution de deux promenoirs, prolongements de l'actuelle terrasse. S'ensuit le dépôt de candidature au Loto du patrimoine en mars dernier. « On ne pensait pas être sélectionné. On est le seul représentant de l'Isère. C'est une véritable vitrine pour nous ! » Si le coût des travaux est estimé à 200 000 euros, la propriétaire ne sait pas quelle somme elle recevra. « Les gens pensent qu'on a gagné au loto, mais c'est faux. On ne recevra que 10 % de l'argent récolté. On connaîtra la somme en septembre. » Si tout se passe comme prévu, les trois chantiers devraient s'enchaîner de 2019 à 2021.

Un achat par amour

Les plafonds, les vitres et la terrasse ne sont qu'une infime partie des travaux engagés par Christiane Guichard depuis 1981, date de son acquisition de la bâtisse. « À l'époque, le propriétaire voulait vendre la maison pour qu'elle soit rasée. C'était inimaginable pour moi qui avais l'habitude de passer devant depuis toute petite. Je l'ai donc achetée. » Elle devient la 13e propriétaire du lieu. La villa est en ruine mais Christiane Guichard s'y installe avec sa famille, plus déterminée que jamais à redonner sa splendeur à ce bijou du XIXe siècle. Elle lui donne le nom de Casamaures, de "casa" qui signifie "maison", "maures" pour le style mauresque et la suggestion du mot "amore" pour les signes d'amour que l'on trouve dans la villa.

En 1985, la demeure commence à accueillir du public. Puis, elle est classée Monument historique l'année suivante. Sa double originalité est mise en lumière : son style oriental et sa technique novatrice de construction en ciment moulé. Le majestueux magnolia, classé "arbre remarquable de France", en fait également un lieu notable. Avec ses propres fonds et l'aide de l'État, Christiane Guichard cherche depuis à reconstituer à l'identique le palais mauresque avec les couleurs et les matériaux d'origine. "Le colibri", comme ses amis la surnomment, compte bien poursuivre son rêve jusqu'au bout. Comme la légende de ce volatile qui tente l'impossible, petit bout par petit bout.

Une maison vivante

Le jour où nous sommes allés à la Casamaures, la sonnette n'a cessé de tinter. Une, deux, trois, quatre, cinq personnes. Rien que ça ! « C'est une maison vivante » rigole Christiane Guichard. Ici, bénévoles, artistes et curieux en tous genres sont les bienvenus, même si la villa n'est ouverte au public que le premier samedi après-midi du mois. Deux associations sont présentes dans les lieux : La Casamaures d'hier et d'aujourd'hui, qui assure les visites, et l'Atelier Tournesol pour les cadrans solaires. La propriétaire accueille aussi des étudiants, des enfants et des stagiaires pour leur transmettre le savoir-faire si particulier de la demeure néo-mauresque.

Dans la propriété, l'art guide les pas des visiteurs. Des expositions se succèdent dans l'orangerie, située sous la villa, comme celle de Guillaume Peruchon, en place jusqu'au samedi 5 octobre. « Il s'agit de photos de la Casamaures prises avec la technique de la camera obscura. »

C'est par le chemin des mots, imaginé par l'artiste propriétaire, que notre visite s'achève, dans le jardin. Une série de moulages de mains, représentant des mots en langue des signes. Ici, le mot "Casamaures", là, le mot "voyage". Rien d'étonnant pour cette propriété où tout pousse à rêver d'ailleurs.

La Casamaures
58 allée de la Casamaures, Saint-Martin-le-Vinoux
Visite guidée chaque premier samedi du mois à 14h. Visite groupée sur demande


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