Gestes naturels et défaillances technologiques par Lee Dahye et Mathieu Arfouillaud

À l'occasion d'un accrochage sobrement intitulé "Nature ?", la galerie Tracanelli fait dialoguer la production de deux très jeunes artistes autour du rapport que leur travail entretient à la dite nature – source d'inspiration pour l'un, sujet de représentation pour l'autre. Stimulant !


Même si cela ne se voit pas au premier coup d'œil, la nature est au cœur du processus de création de Lee Dahye, artiste d'origine coréenne, actuellement en dernière année aux Beaux-Arts de Paris. Elle développe un travail dont les œuvres réalisées au pinceau ou bien au charbon sont largement inspirées par son environnement naturel dont elle s'imprègne longuement afin d'en retranscrire les effets par l'accomplissement de gestes sûrs qu'on imagine guidés avec une grande concentration.

Ainsi, dans une série de peintures de petits formats, la touche picturale, et le geste qui l'accompagne, parviennent à créer des effets qui évoquent tour à tour la fluidité aquatique, la froideur minérale ou le duveteux végétal. L'attention accrue et la sensibilité singulière que Lee Dahye entretient avec son environnement lui permettent de donner forme à des compositions abstraites d'une grande diversité.

Derrière la toile

À l'inverse, Mathieu Arfouillaud présente une série de toiles de paysages de facture assez classique, très illusionnistes, sur lesquelles surgissent au premier plan des formes géométriques colorées évoquant différents types d'interférences analogiques ou numériques propres aux images vidéos – une mire de télévision, les échantillons de couleur d'un étalonnage, un glitch... Étrangement, au fur et à mesure que l'on s'approche de ces toiles, ces éléments chromatiques parasites affirment leur dimension picturale et s'offrent comme des mini-compositions abstraites lumineuses contrastant avec l'ambiance crépusculaire des paysages sombres sur lesquels elles sont superposées.

Ainsi, ce qui semble, à distance, être le résultat d'une possible défaillance technologique apparaît, paradoxalement, lorsqu'on s'en approche, comme le résultat d'un travail pictural manuel jouant des possibilités du médium : la touche, la transparence et les coulures.

Nature ?
À la galerie Tracanelli jusqu'au jeudi 31 octobre


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