Vision trouble

La librairie Arthaud accueille la photographe Michèle Crozet jusqu'au 28 février. L'artiste choisit d'utiliser la photo pour créer des images troubles, comme un mouvement contraire à toutes les retouches numériques.


Si, dès son invention, la photographie a souvent été louée par la communauté scientifique pour sa capacité à produire des images nettes et précises, le monde artistique, au contraire, le lui reprochait. Ce cher Baudelaire, par exemple, la trouvait triviale et vulgaire. Si le milieu de l'art a finalement accepté sa netteté (et parfois même qu'elle soit en couleur !), certains photographes, aujourd'hui, apprécient de jouer avec sa capacité à créer des images ordinaires – comme un mouvement contraire à la tendance ultra-léchée permise par la retouche numérique. Michèle Crozet fait partie de ceux-là. Ses photographies sont nimbées d'un flou permanent qui rend énigmatique les sujets les plus triviaux. Ainsi, le regard du spectateur est-il propulsé dans des univers et des atmosphères bien éloignées du sujet réellement photographié, dont la photographe ne nous dit rien. Les contre-jours, les grossissements exagérés et les reflets de toutes sortes sont autant de moyens de plonger le visiteur dans une nébuleuse visuelle un peu perturbante. Au milieu toutefois, un court film dont la trame narrative, si elle est limpide et précise, reste volontairement pleine d'absences, nous rappelle que ce n'est pas parce qu'on y voit plus clair que tout est explicite.

Images incertaines (Michèle Crozet)
Á la librairie Arthaud jusqu'au 28 février


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Bracco, MoulinexxX et Balladur, à contre-courant