Midnight Runner

De Hannes Baumgartner (Sui., 1h32) avec Max Hubacher, Annina Euling, Sylvie Rohrer…


Champion de course, Jonas s'entraîne avec une ombre au-dessus de la tête : celle de son frère mort, qui jadis le soutenait. Déséquilibré par son absence, il se met à agresser des femmes nuitamment. Le jour, il donne le change : personne ne réalise vraiment la gravité de son état…

Froid, clinique, sec… Tel semble Jonas, tel paraît être le film. Voudrait-on appuyer sur des clichés que l'on incriminerait en sus la rugosité du dialecte suisse-allemand, l'ambiance hivernale des entraînements dans les forêts boueuses ou sur le pavé bernois et l'image bleuâtre ! Nul besoin d'ajouter que Baumgartner s'est inspiré d'un fait divers pour charger la barque de ce douloureux long métrage peu bavard, et cependant fascinant dans sa limpidité : le mal-être de Jonas évident, dévorant, obsédant et antérieur à la disparition de son frère – on découvrira qu'ils ont tous deux été placés dans une famille d'accueil – n'est plus apaisé par la pratique hypnotique du fond. Il a trouvé un dérivatif plus puissant dans la transgression d'un interdit ; une décharge d'adrénaline supérieure aux endorphines. Une pulsion contre la raison.

Généalogie d'un processus criminel, Midnight Runner montre sans effet – si ce n'est des cauchemars trouant les nuits sans sommeil de Jonas comme autant de protestations subconscientes – l'effarement du névrosé répétant ses passages à l'acte, adressant des courriers d'excuses à ses victimes. Paradoxal coureur implorant au fond de lui qu'on l'attrape et qu'on le retienne pour qu'il soit enfin délivré…


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