Concerts debout : on en est où ?

Enquête / C'est la question qui taraude presque tout le monde : les concerts debout en intérieur, toujours interdits à l'heure de notre bouclage, vont-ils bientôt pouvoir reprendre ? Et quelles stratégies les salles les accueillant mettent-elles en place dans ce contexte d'incertitude ? Tour d'horizon.


Pas de nouvelles, bonnes nouvelles ? Sans prise de position officielle claire depuis la fin du confinement, il n'était pas interdit d'espérer secrètement un déblocage tardif de la situation pour les salles ayant l'habitude d'accueillir des concerts debout. Un espoir aujourd'hui de plus en plus ténu – pour ne pas dire inexistant. C'est du moins le constat sans appel que l'on dresse après s'être entretenu avec des acteurs culturels comme la Bobine, l'Ampérage, la Source ou encore la Belle Électrique : plus personne ne croit encore vraiment en une possible évolution de la situation avant 2021, tout juste les plus optimistes s'autorisent-ils encore à garder un très mince espoir de changement pour le mois de décembre. À défaut, il faut donc pour les salles apprendre à composer avec l'incertitude. Les uns après les autres, et au compte-goutte la plupart du temps, les évènements debout un temps annoncés pour l'automne se voient de nouveau annulés ou reportés (le plus souvent à des échéances prudemment lointaines). Au mieux, ils sont transposés dans des configurations assises, avec toutes les contraintes que cela impose.

Assis ou dehors

Dans ces conditions, que faire pour maintenir coûte que coûte une activité de diffusion ? Pour les salles qui en ont la possibilité, profiter des derniers beaux jours pour investir sur des configurations en plein air constitue une première option. Traditionnellement organisé in situ, le fédérateur concert de rentrée de la Source sera ainsi délocalisé cette année au parc de la Poya. Du côté de la Bobine, les apéros-concerts et apéros-mixs sont pour l'heure maintenus en extérieur. La Belle Électrique, quant à elle, renouvelle sa Guinguette sur l'esplanade Andry-Farcy du 10 au 20 septembre. Au-delà de cette option temporaire, la seule alternative est de passer sur des formats place assise en intérieur, là encore quand la configuration le permet. Une solution de secours qui ne résout pas tout pour autant. La réduction de la jauge induite par un passage en places assises a bien évidemment un impact direct sur la rentabilité d'un concert et implique bien souvent de fonctionner à perte, ce qui met automatiquement en péril l'équilibre financier souvent fragile par lequel les salles arrivent en temps normal à se maintenir à flot. Par ailleurs, si certaines esthétiques comme le jazz, la chanson ou les musiques du monde peuvent s'accommoder sans trop de difficulté d'une configuration en places assises, en ce qui concerne le rock, l'électro ou le hip-hop, c'est tout de suite, on l'imagine bien, plus compliqué. Nécessité faisant loi, les chances sont donc grandes qu'il faille s'habituer, ces prochains mois, à un spectre de musiques actuelles bien moins éclectique qu'à l'accoutumée. Et malheureusement, les difficultés ne s'arrêtent pas là…

La fin d'une époque...

Au-delà de ces contraintes logistiques en effet, d'autres problèmes demeurent : si, habituellement, la programmation d'une salle n'est déjà pas une activité de tout repos, elle se transforme dans les conditions actuelles en véritable casse-tête. La situation et les réglementations variant du tout au tout d'un pays à l'autre, l'immense majorité des artistes internationaux voient ainsi leurs tournées annulées. Et même à l'intérieur de la France, du fait du climat d'incertitude généralisé et du basculement potentiel à chaque instant des zones vertes en zones rouges, la plupart des tournées nationales sont elles aussi reportées à 2021. En quelques mois, c'est ainsi tout un écosystème qui s'est effondré, avec des conséquences financières souvent dramatiques pour chacun des maillons de la chaîne, des artistes aux tourneurs en passant par les salles. Le modèle économique et les capacités d'adaptation de chacune des structures varient souvent du tout au tout, mais le bilan n'en reste pas moins le même : l'avenir s'annonce hautement incertain.

... et le début d'une nouvelle ?

La situation actuelle pour les salles accueillant des concerts debout (mais aussi les artistes, tourneurs, associations organisatrices…) est donc ardue. Complexes aussi, les difficultés, notamment financières, auxquels les uns et les autres se retrouvent confrontés. Quelques lueurs d'espoirs subsistent néanmoins. Des annonces de soutien financier plutôt encourageantes ont récemment été faites par le ministère de la Culture – reste bien sûr à voir de quelle manière et selon quels critères elles se concrétiseront. Le public, lui, a largement témoigné de son soutien aux acteurs de la culture. Les différents interlocuteurs que nous avons pu rencontrer mettent également en avant le maintien de leurs nombreuses activités hors diffusion (résidences scéniques, studios de répétition, éducation socio-culturelle, accompagnement de groupes, soutien au monde associatif…). Ils se félicitent d'échanges accrus entre différentes structures, tout en évoquant leur volonté sans faille de s'adapter et de se réinventer pour faire face aux contingences actuelles. La capacité à rebondir est donc là : elle ne sera pas de trop pour que tous, et notamment les plus fragiles, puissent subsister à l'onde de choc.


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