Matt Elliott ou le triomphe de l'a-volonté

Chanson / Crépusculaire et lumineuse : voilà les qualificatifs valant célébration et malédiction quand il s'agit d'évoquer l'œuvre de Matt Elliott, qui sera à la Bobine samedi 17 octobre.


Matt Elliott. Un Anglais venu chercher son paradis pas très blanc par chez nous, fuyant le mauvais temps et les vents mauvais de la perfide Albion. Pas de bol, il s'était installé à Nancy, où il fait aussi moche que n'importe où en Angleterre. Preuve qu'on ne se refait pas : on se défait, tout au plus. Et Farewell to all we know, sixième œuvre solo, le démontre en mode "Leonard Cohen fait l'Espagne" (cette douce voix d'outre-tombe, ces guitares hispanisantes et à l'âme slave). Où le Bristolien célèbre l'espérance déchue (What once was hope), les lendemains qui déchantent (The Day After), les au revoir éternels (Farewell..., Bye now) et l'aboulie comme aller simple vers la Camarde (Aboulia).

Tout juste concède-t-il en sortie de disque, sur The Worst is over, que le pain noir est mangé (encore heureux !). Mais en nuançant l'affirmation d'un "perhaps" qui pèse son poids, et distillant l'intuition que cette promesse du mieux ne s'embrasserait que dans la mort : « When you finally learn to live / Then, it's already too late » feule-t-il sur Hating the player, hating the game. Reste que comme dans un tableau de Turner – qui eut pu en son temps signer la pochette brumeuse du disque, qui fige un type pris en flagrant délit d'effacement – toute cette noirceur, cette ombre portée sur le monde comme un linceul, est éclatante de beauté, pour peu que l'on se donne la peine de s'y abandonner.

Matt Elliott. À la Bobine samedi 17 octobre (concert avancé à 18h15)


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