Festivals estivaux : des incertitudes demeurent

Roselyne Bachelot a tranché : pour la ministre de la Culture, les festivals estivaux ne pourront accueillir que 5 000 personnes assises et distanciées, dans le respect des gestes barrières. Les organisateurs sauront-ils s'adapter ? Certains d'entre eux ont déjà renoncé. D'autres nous ont répondu et fait part de leurs difficultés.


Magic Bus en format réduit

En novembre dernier, l'association Retour de Scène se voulait optimiste (on ne sait plus trop, mais il y avait peut-être de quoi, à l'époque !) et annonçait des dates pour son prochain festival Magic Bus. La 20ème édition devait se tenir du 6 au 8 mai, avec une programmation presque bouclée. Aujourd'hui, l'équipe du festival est largement revenue sur ces projets initiaux, mais elle ne s'en démène pas moins pour maintenir un événement adapté aux contraintes sanitaires annoncées.

Damien Arnaud, coordinateur de l'association grenobloise, nous explique tout : « On est en cours de réflexion pour proposer un format assis en jauge réduite (pas plus de 500 personnes) courant juin. Ce ne sera pas à l'Esplanade, mais on cherche tout de même un lieu en plein air. La programmation sera axée sur la découverte de la scène locale avec, tout de même, un ou deux artistes d'envergure nationale en tête d'affiche. Certaines esthétiques, comme l'électro, ne seront malheureusement pas représentées. Ce sera une autre approche, plus tranquille. Ce que je peux d'ores et déjà annoncer, c'est que le Student Groove Orchestra, en partenariat avec le Crous, sera de la partie. » On en saura certainement un peu plus d'ici la fin du mois. / HV

Musée Électronique et Holocène reportés à 2022

Du côté du Périscope, l'organisateur à Grenoble des festivals Musée électronique (d'abord annoncé en juin, puis en septembre) et Holocène (octobre), la décision est déjà prise : rendez-vous en 2022. Il faut dire que les esthétiques proposées par ces deux événements (très électroniques et très dansantes) ne sauraient se déployer devant un public assis. « Aujourd'hui, il y a trop d'incertitudes. On espère que l'année prochaine, le contexte sera meilleur. D'ici là, en tant que public, on sera très heureux de découvrir les propositions des autres organisateurs », conclut Sophie Boizot, responsable communication. / HV

Vercors Music Festival : des dates, mais…

« Dans les scénarios que nous avions étudiés en fin d'année dernière, nous avions anticipé l'idée d'une jauge assise, dégradée et distanciée » : c'est avec un relatif soulagement que Hadrien de Villeblanche, l'un des membres de l'équipe du Vercors Music Festival, a accueilli les annonces de la ministre. Vendredi 26 février après-midi, il confirmait les dates de l'événement : du 2 au 4 juillet prochains. Tout en restant prudent : « Une deuxième année blanche consécutive est inconcevable pour nous. On a imaginé être capables d'accueillir entre 1 000 et 2 000 personnes assises et distanciées, avec une scène payante et une autre en concerts gratuits. Restent des interrogations, notamment sur la restauration et le bar. Ils sont conditionnés, si j'ai bien compris, à l'ouverture des établissements traditionnels. J'ai bon espoir qu'un assouplissement soit possible sur la base de protocoles sanitaires stricts. C'est notre pari. »

D'une manière générale, Hadrien de Villeblanche espère en savoir plus bientôt sur les aides accordées au festival. Il assure que, pour l'heure, les artistes invités répondent plutôt favorablement au nouveau format, « même si on sait depuis le début que ce sera plus compliqué pour les artistes étrangers d'être présents sur le territoire cet été ». Les organisateurs du festival restent désormais en contact avec les services de l'État et les collectivités territoriales pour faire avaliser leur dispositif. Les premières annonces de programmation, elles, devraient tomber d'ici début avril. « Tout le monde est dans les starting blocks. On est assez confiant sur le fait de mobiliser le public. » / MK

Musilac se prononcera bientôt

Rémi Perrier, l'organisateur du festival, a « accusé le coup », mais n'avait pas encore de réponse définitive à donner, mardi 2 mars au matin, sur la bonne tenue du festival, du 8 au 11 juillet prochain : « Nous sommes toujours dans l'étude de la version dégradée proposée par la ministre. Elle nous conduirait à réduire notre programmation, mais, avant de nous prononcer, on veut aller au bout de cette idée. Cela pose des questions : quid des musiques urbaines ? Quid de l'électro ? Quid du pop rock énergique ? Que se passerait-il si certains se lèvent pendant un concert, simplement pour montrer qu'ils vivent le truc ? » En situation normale, Musilac peut accueillir jusqu'à 30 000 personnes debout et, sauf exception, n'en reçoit jamais moins de 20 000 simultanément. Du côté des artistes, Rémi Perrier assure ne pas subir de pression : « Quand on s'est appuyé sur la programmation prévue en 2020 pour créer celle de 2021, certains Anglo-saxons importants se sont désistés. Mais à ce stade, personne d'autre n'a pris position. J'imagine que certains groupes n'adhéreront pas au public assis, mais on me laisse encore bosser. C'est vrai au-delà même de l'artistique, parmi nos partenaires ou nos prestataires. » 

Parmi les questions qui se posent encore, lui aussi pointe notamment une incertitude persistante sur les prestations de bar et de restauration sur site : au-delà du manque à gagner économique, il lui est difficile d'envisager accueillir les festivaliers sans offre de cette nature. En tout état de cause, ceux qui viendront seraient regroupés sur un gradin, les concerts se déroulant sur une seule scène. Rémi Perrier s'inquiète de l'absence d'un accompagnement financier de source étatique, si d'aventure Musilac ne pouvait avoir lieu. Il dit s'être rapproché de ses interlocuteurs habituels et notamment de la mairie d'Aix-les-Bains, mais assure n'avoir eu aucun échange et aucun écho d'un possible soutien nouveau venu de l'autorité régionale. En revanche, il a bien noté qu'Emmanuel Macron évoquait la mise en place possible de pass sanitaires… et reste donc en attente d'éventuelles précisions sur ce point. Le chef de l'État a fait mention de cette possible mesure le 25 février, après un débat avec ses homologues européens. / MK

Des dossiers à suivre…

Nous avons tâché de rédiger au plus vite cet article après avoir obtenu des informations de nos interlocuteurs. La situation étant amenée à évoluer de jour en jour, d'autres articles sur le sujet pourraient suivre très prochainement. Nous n'avons évidemment pas encore fait le tour de l'ensemble des rendez-vous festivaliers (musicaux et autres) habituellement programmés au cours de l'été. / MK


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