Accrochage dialogique

Tout simplement intitulée "Dialogues", l'exposition qui marque la réouverture du musée Géo-Charles propose de faire converser le travail de quatre artistes ainsi que celui des étudiants de l'ESAD avec les œuvres de la collection du musée. Sympathique.

 


Les entraîneurs d'équipe de football et les commissaires d'exposition partagent en commun de devoir tirer le meilleur d'un collectif en favorisant le dialogue entre ses membres – les joueurs pour les premiers, les artistes pour les seconds. La nouvelle exposition du musée Géo-Charles (farfelu poète féru de sport) invite précisément des artistes contemporains à choisir parmi la collection du musée des œuvres avec lesquelles ils souhaiteraient jouer le temps d'un accrochage – un peu comme si on offrait l'occasion à Mbappé de faire équipe avec Platini. Au rez-de-chaussée, l'exercice est proposé aux étudiants de l'ESAD qui, par le biais de dispositifs ou d'installations tour à tour poétiques, politiques ou ironiques, font des propositions amusantes. Autant d'occasions de redécouvrir certaines pièces de la collection : les galets-poèmes de Géo-Charles, les dessins et jeux pour enfants de Monteiro ou les gravures de Masereel.

Rapprochements et face-à-face

À l'étage, ce sont quatre artistes invités qui jouent le jeu de l'accrochage dialogique. Le peintre et bédéiste Jean-Marc Rochette expose ses imposantes parois picturales à proximité de deux photographies que tout oppose : un immense format glacé qu'Éric Bourret a réalisé dans l'Himalaya, l'objectif tourné vers les cieux, et un petit format abrasif, gros plan sur le bitume, de Jean-Christophe Norman. Ces trois-là partagent en commun de rendre compte d'une tension entre matérialité terrestre et immensité céleste. De son côté, Pierre Canaguier joue des rapprochements formels entres ses photographies et une magnifique composition abstraite d'Otto Freundlich, peintre allemand du début du XXe siècle, proche des constructivistes. Plus loin, en choisissant de faire dialoguer différentes esquisses préparatoires du musée à son travail de recherche (en l'occurrence un projet d'installation qu'il a conçu pour le musée en 2014), Blux interroge le processus de création et nous plonge dans un univers mystérieux où l'extérieur envahit l'intérieur et où les jeux lumineux s'entremêlent au mouvement des nuages. Enfin, le peintre Julien Beneyton opte pour un rapprochement thématique en confrontant ses portraits à celui, photographique, d'un boxeur kenyan de Philippe Bordas. Dans un style qui oscille entre naïveté et virtuosité, Beneyton rend tout à la fois hommage aux grands maîtres flamands dont il est admiratif et aux cultures populaires d'une époque désormais révolue, celle de l'analogique. C'est alors à une autre forme de dialogue qu'il nous invite. Follement stimulant !

Dialogues. Regards d'artistes sur la collection Géo-Charles. Au musée Géo-Charles, jusqu'au 29 août


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