Graines de solidarité

Depuis mars 2021, migrants et non-migrants se retrouvent au Jardin sans frontières pour cultiver ensemble une parcelle de terre dans le parc des berges de l'Isère. Nous avons fait le tour du propriétaire en compagnie d'Alpha et Saibou pour en savoir un peu plus sur cette initiative solidaire.


Entre le Stade des Alpes et les berges de l'Isère, le parc a des airs de terrain en friche sommairement entretenu, équipé de quelques agrès sportifs et traversé par des routes abandonnées prisées des cyclistes et des skateurs. À la fin de l'année 2020, des pelleteuses sont intervenues pour travailler le terrain et des serres agricoles ont commencé à apparaître, puis deux containers servant de bureau et d'entrepôt. Aujourd'hui, sur la parcelle de 2500 m² délimitée par des barrières, poussent de nombreux pieds de tomates, des pommes de terre, des herbes aromatiques, des fraises, des oignons, des courges et des plantes plus exotiques telles le gingembre ou le gombo, légume typique de l'alimentation africaine. « Nous allons voir si cette plante veut bien pousser en France, c'est un test », explique Alpha Camara, Guinéen en attente de régularisation. Il est aussi co-président de l'association Jardin sans frontières, à l'initiative de ce potager intergénérationnel et interculturel.

Avant de se constituer en association, le projet Jardin sans frontières a été proposé au budget participatif de la ville de Grenoble 2019 dont il a été un des lauréats. Alpha Camara l'a porté avec Florence Grenier, rencontrée au sein de l'association Cuisine sans frontières, qui favorise l'intégration des sans-papiers par la cuisine. Aujourd'hui, le noyau dur de Jardin sans frontières est constitué d'une quinzaine de personnes, avec, au bureau, des binômes migrants/non-migrants à chaque poste clé (président, trésorier et secrétaire). Un fonctionnement permettant aux étrangers de se familiariser avec les spécificités françaises.

Un espace d'épanouissement

Cet esprit de partage de compétences et de cultures se retrouve aussi dans le fonctionnement du potager avec deux parcelles où s'expriment les différentes manières de jardiner. L'une à la mode française, l'autre plutôt à l'africaine. Saibou, l'un des jardiniers, nous explique : « On fait en sorte de partager nos méthodes de culture. On a voulu mettre en œuvre ce que l'on pratique vraiment en Afrique. Par exemple, ici on fait beaucoup de semis sous serre. En Afrique, on plante directement les graines dans la terre. On verra si ça marche à Grenoble ! Et l'année prochaine, nous pourrons planter beaucoup plus de légumes typiquement africains. »

Les jardiniers sont aidés et formés occasionnellement par des agriculteurs et des maraîchers bénévoles. Ouvert à tous, le jardin permet de créer des liens entre les migrants et les habitants du quartier ou d'ailleurs. Une parcelle de co-jardinage est en cours de création, où les Grenoblois pourront se servir en légumes en libre-service. Espace d'épanouissement et de rencontres, ce jardin permet en outre aux migrants de limiter leur dépendance vis-à-vis des associations caritatives tout en participant à l'entraide alimentaire. Les migrants auront ainsi l'occasion de retourner l'aide reçue par le fruit de leur travail et par la transmission de leurs connaissances.

Jardin sans frontières. https://www.facebook.com/JardinSansFrontieres


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