Shannon Wright va piano


Arpentant les scènes françaises avec la régularité d'un métronome, Shannon Wright n'a l'an dernier pas fait exception à la mode des concerts multi-reportés qui n'ont sans doute guère eu l'heur de lui plaire, elle qui vit pour la scène, qui fait bouillir la marmite autant qu'une âme affamée. C'est au piano, comme prévu initialement, que s'opère le retour.

Ce même piano qui lui sauva la vie (artistique), par l'entremise de Katia Labèque, l'empêchant de raccrocher pour de bon en 2015 après une énième crise de doute (qui la jeta dans un studio muni d'un spécimen de l'instrument avec interdiction d'en sortir tant qu'elle n'aurait pas repris du plaisir à composer). Ce piano sur lequel elle a écrit une partie de Division (2017) et surtout le sublime Providence (2019) sur lequel la rage sonique habituelle se rentre pour parcourir l'échine de l'intérieur, coller des gnons grimés en caresses, rallier le cri primal via la complainte.

Comme toujours avec Shannon Wright, se fait jour ici, dans cet exercice piano-voix auquel a participé Katia Labèque, un troublant équilibre entre fragilité et puissance – cette fille pourrait, pense-t-on, casser un mur à coups de verre en cristal. C'est sans doute le fruit d'un art du dépouillement qui atteint ici son paroxysme et qui depuis 20 ans fait la singularité de Shannon Wright.

Shannon Wright + Rosemarie vendredi 19 novembre à la Source


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