Klô Pelgag, extravaganza québécoise

Fièvre des mots et des couleurs, décors surréalistes et changeants au gré de l'inspiration d'une artiste maintes fois récompensée au Canada et en France, Klô Pelgag baigne dans un univers pop orchestral qui déraille en tous sens. Interview au délicieux accent québécois à l'occasion de sa venue à la Maison de la Musique de Meylan le 10 décembre. 


Le 10 décembre, vous serez à la maison de la musique de Meylan. À quoi doit-on s’attendre si on ne vous a jamais vu performer en live ?

Je pense qu’il faut s’attendre à beaucoup de consistance musicale, une synergie sur scène avec les musiciens, une énergie forte, beaucoup de générosité d’après ce qu’on m’en dit. C’est difficile de parler de soi-même d’un point de vue extérieur...

Paru le 26 juin dernier, ce troisième album intitulé Notre-Dame-des-Sept-Douleurs est un “album-concept”, baptisé du nom d'un village de Gaspésie que votre imaginaire d’enfant associait à une vision d’horreur. Comment ce lieu, qui représentait une menace pour l’enfant que vous étiez, est-il réapparu différemment plus tard ?

C’est un village que je n’ai jamais visité avant l’âge de 29 ans. Donc au départ je ne me fiais qu’au nom, puis tout l’imaginaire, toutes mes pensées se sont construites autour d’une idée que je m’étais faite, sans connaître la réalité. Je fais le parallèle avec l’état dépressif et toutes les angoisses qui partent de nos peurs les plus profondes, à quel point on est parfois notre pire ennemi. Puis entre le moment où justement je suis sortie de cet état là et où je suis allée visiter ce village. Le moment où j’ai découvert que c’était finalement une île magnifique, tout l’inverse de ce que j’avais imaginé. C’était un élan de curiosité mais ça concordait aussi parfaitement avec tout ce que je vivais. Pour moi c’était le moment parfait où je devais aller visiter ce lieu.

Vous semblez vivre vos joies et vos peines avec une intensité extrême. Est-ce que les pôles de l’euphorie et de la mélancolie s’équilibrent avec le temps ?

Je pense que dans mes textes, dans ma musique et mon rapport à l’art, on est plutôt dans la mélancolie que l’inverse. Par contre, tout ce qui est prolongement de ma musique c’est plutôt dans la couleur et l’euphorie. Plus je vieillis, plus j’apprends. Je suis davantage dans le laisser-aller et l’apprentissage du bonheur, dans une forme de légèreté. Mais c’est sûr que ces traits font partie de moi et c’est ce qui fait que je fais de la musique aussi. Pour aller au bout de nos idées, il faut quand même avoir de gros tempéraments.

Est-ce que c’est votre marque spécifique d’aborder des thèmes relativement graves dans une forme de légèreté ? 

C’est le subterfuge de ce que je fais, et c’est pas vraiment conscient non plus. C’est vrai qu’on m’a souvent parlé de ce clash là entre les thèmes et musicalement, mais je suis aussi quelqu’un qui adore les contrastes. Pour moi, il y a cette exploration dans la musique, ce dépassement qui est aussi au centre de mes pensées et de ce que j’ai envie de faire. On s’éloigne plus de la tradition des chansons.

Pour quelque chose de plus expérimental ? 

Oui !

Vous avez collaboré avec Pomme, l’artiste rhodanienne, sur le titre Sorcières. Cette figure de la sorcière vous inspire ?

J’ai écrit le refrain, j’ai réalisé et arrangé la chanson et Pomme est arrivée avec les couplets. À ce moment-là, on tripait sur le livre de Mona Chollet. Je pense que c’est une chanson qui prône un peu la différence, l’imperfection des femmes puis qui rallie tous les points forts ou faibles qui font de nous un individu.

Quels choix esthétiques avez-vous fait pour cette dernière pochette ?

Je voulais que ce soit représentatif de l’album, transparent, frontal. C’est un petit rappel de quelque chose de baroque avec les cordes, les cuivres… mais avec un aspect contemporain aussi, avec mes cheveux jaune néon, le hoodie et une collerette qui vient un peu casser les références. Finalement c’est peu d’éléments qui parlent beaucoup de l’album. Je suis assez fière de cette pochette.

 

Dans vos textes et vos clips, il y a une multitude de représentations animales, végétales, tout un bestiaire et beaucoup d’évocations aux éléments naturels en général. Est-ce lié à la Gaspésie ?

Peut-être que là d'où je viens fait que j’ai un rapport proche avec la nature. J’ai vraiment l’impression que la nature, c’est beaucoup plus grand que nous, c’est beaucoup plus exceptionnel, plus riche et infini. Dans le clip de Maison jaune, mon apport c’est vraiment l’image de l’arbre que je traînais depuis des années : moi accroupie sur l’arbre le plus haut de la forêt.

Avez-vous déjà mis les pieds à Grenoble ? 

C’est un drôle de souvenir, parce qu’on était dans une immense salle (rires). Ça n'avait aucun rapport qu’on joue là, c’était comme une erreur de booking. On en parle souvent et on en rit. Je pense qu’après nous tout le monde venait pour un DJ set !

La Belle Electrique ?

Oui c’est ça ! Sinon, on est vraiment excités d’être en France en ce moment, de revivre les tournées, ça s’apparente presque à une autre vie.

Qu’écoutez-vous en ce moment ?

J’écoute le dernier album de Suuns. Je le recommande fortement !


<< article précédent
Y’a pas que le ski dans la vie