Se reproduire ou non, telle est la question

"Faut-il arrêter de faire des enfants pour sauver la planète ?" C'est la question-titre du livre d'Emmanuel Pont, sorti il y a une dizaine de jours aux éditions Payot. Il en débattra avec les Grenoblois le 8 mars.


Est-ce une voie marginale qui fait seulement parler d'elle, ou une vraie tendance de fond ? Ce que les Américains ont baptisé le Gink ("Green inclinations, no kid") apparaît comme l'engagement écologique ultime : ne pas faire d'enfant pour préserver la planète. Les témoignages de femmes et d'hommes, souvent jeunes, qui procèdent (ou souhaitent le faire) à une stérilisation définitive, comme pour affirmer ce choix au-delà d'un contraceptif réversible, se multiplient. En premier lieu celui de Sereb, un Grenoblois de 31 ans, qui s'était fait remarquer en 2019 en répondant au journaliste Hugo Clément pour Konbini. Sereb a justement travaillé de concert avec Emmanuel Pont, l'auteur du livre Faut-il arrêter de faire des enfants pour sauver la planète ? (Payot, 2022).

Ça ou le végétarisme…

« Arte avait organisé un gros sondage participatif sur le sujet, qui indiquait que 60% des gens considéraient que c'était un dilemme de faire des enfants dans ce monde de crise écologique », indique Emmanuel Pont, ingénieur de formation, qui planche sur la question des "Ginks" depuis plusieurs années. « Il y a deux questions : quel est le poids écologique d'un enfant, est-ce que j'ajoute un consommateur, un pollueur de plus ? Et le deuxième aspect, va-t-il vivre un futur horrible que je ne lui souhaite pas ? » C'est la seconde option qui avait décidé Sereb à la vasectomie, car les deux hommes sont d'accord pour réfuter les « chiffres gigantesques qui circulent. Selon des calculs plus raisonnables, renoncer à avoir un enfant, écologiquement, ça revient au même ordre de grandeur que de devenir végétarien », résume Emmanuel Pont. La démographie, souvent agitée comme responsable numéro 1 des maux de l'environnement (coucou, Thanos), ne peut être traitée distinctement de tout le reste. D'autant que ce sujet amène des débats politiques difficilement acceptables au niveau éthique… De surcroît, philosophiquement, n'est-il pas un peu simpliste de réduire l'individu à un seul poids sur le climat ? « C'est effectivement une perspective un peu réductrice. Les individus ne sont pas que des consommateurs, ils ont un autre impact sur le monde, ils peuvent faire le bien... Tout cela dépend très largement de la manière dont on vit, de nos systèmes politiques, plus que de la démographieEt actuellement, les gens qui renoncent à avoir un enfant – 5% selon les dernières estimations , c'est beaucoup plus pour des raisons économiques qu'écologiques. » Entre les femmes critiquées car elles n'ont pas de désir personnel de maternité, les familles nombreuses culpabilisées, et ceux qui affirment ne pas vouloir d'enfant pour protéger la planète, la conclusion est la suivante : faites bien comme vous voulez ! Et si la question vous taraude, vous pourrez en référer au livre nuancé d'Emmanuel Pont…

Café Collaps avec Emmanuel Pont dédicace et conférence-débat "La tentation du biologisme et de l'équationnisme dans la pensée écologiste", au café La Table Ronde, mardi 8 mars de 18h30 à 21h. Entrée libre


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