Les mots des maux


« Disons clairement les choses : après s'être goinfrée à la table du monde, l'Europe voudrait quitter le restaurant sans payer l'addition. » En ces temps de campagne présidentielle où les discours d'extrême droite cristallisent l'attention, le spectacle Ce qu'il faut dire de Stanislas Nordey a quelque chose de salutaire. En portant sur le plateau des textes puissants et engagés de l'autrice franco-camerounaise Léonora Miano, l'homme de théâtre offre un espace de réflexion bienvenu sur des sujets électriques – l'identité, l'histoire coloniale, l'assimilation… Au public – nous – de composer avec.

Sur scène, trois jeunes comédiennes « afropéennes » (un terme que défend Léonora Miano, pour permettre de « parvenir à la création de sociétés plus inclusives, post-occidentales ») livrent la pensée de l'autrice en trois segments distincts : un premier sur ce que renferment les mots "blanc" et "noir", un deuxième évoquant frontalement la colonisation, et un troisième en forme d'ouverture – un dialogue entre deux générations. Tout en restant un véritable acte théâtral, et non une simple mise en espace d'une lecture, la mise en scène est volontairement sobre et percutante (voire percussive !), sans effets superfétatoires qui amoindriraient la parole de l'autrice. La première séquence, avec une comédienne dont le visage filmé en gros plan est projeté en fond de scène, en est le meilleur exemple, les moments de silence en disant autant que le texte.

Ce qu'il faut dire du 5 au 7 avril à la MC2, de 5€ à 28€


<< article précédent
Kittin & The Hacker : madeleine électronique